Il la tient serrée contre lui
Une main sur son épaule nue
Jambes collées accordéon tango
Musique dans le coeur dans le ventre
L'accordéon l'enlace le plus beau des tangos
Envie de rire et de pleurer
La vie vaut la peine oui la vie vaut la peine
Elle les voit tous les deux qui tournent sur la place
Le rythme du tango
La robe rouge de sa mère ses talons hauts
Elle au bord elle les dévisage
N'ont pas leurs yeux de la semaine
Sont emportés très loin si loin des gens autour
Ils dansent tous les deux tous les tangos du monde
Ce soir elle a cinq ans elle regarde le couple
Pour toujours elle le regarde
Vole sur leurs visages le désir son émerveillement
Édifier sa pensée son visage
Dans une lenteur où elle se rejoint
L'entente avec le livre
Ce qu'elle ne voyait pas
L'espace s'ouvre
un gai savoir
Les mots
une suture
Au fil des âges les mots
Lui donnent du plaisir
Comme quand la musique l'enveloppe
Tout son être consent à la caresse des voix
Ces moments l'agrandissent
.
De sa main lentement
il effeuille le silence
il caresse son corps
lui donne sa parole
ainsi naît l'inoubliable
ça ressemble à l'origine
c'est plein de rayonnement
une rencontre une préférence
il était une fois
trouver dans le partage
ce dont on ignorait avoir besoin
Il lui offre ce qu'il y a de plus haut
cet amour
quand l'un pour l'autre
on devient nécessaire
Et lui permet ainsi de croire
Que vivre peut être facile
Entre les blancs
Le retour inlassablement
Des images
L'une
Puis l'autre
Arrêt sur visages
Ainsi relire l'oubli
Sous les branches du figuier…
Sous les branches du figuier
s'aimer sans hâte
nudité célébrée
un goût de raisin noir dans la bouche
lèvres accordées effacent le précaire
flammes gravées en soi comme les initiales
enlacées sur le tronc de l'arbre
fragile rempart pour vivre
sans terreur l'innommable
Encore faudrait- il
ouvrir les yeux
pour voir
tapie derrière la vie
l'ombre portée de la mort
remettre les choses
à l'endroit
solitudes
solidaires
ce qu'on appelle
destin
Elle donne naissance
s'impose la séparation
couper le lien
pour qu'un autre librement
vienne au monde
naître et mourir
contenus dans le geste
désormais
ce lien l'accompagne
il fonde le désir d'union
celui d'éternel retour
amour et sang mêlés
Pas facile alors…
Pas facile alors
de vivre
avec la crainte de
ne pas être à la hauteur
elle ne savait même pas de quoi
À cloche-pied…
À cloche-pied l'enfant avance
un manteau trop grand sur l'épaule
fatiguée sans savoir qu'elle porte
ce qui ne lui appartient pas
avec ses semelles de plomb
elle ne peut grandir plus vite
elle voudrait tant ressembler à
dans ses rêves
elle incendie le seuil
Mais les vibrations de la voix
les gestes à perte de vue
cet au-delà au plus profond
ce manque absolu qui taraude ?
Voué à l'éphémère on rêve de définitif
Au bout du compte qu'a-t-on choisi ?