"L'Épervier rassemblait toutes ses forces contre la marée, mais la marée était plus forte encore. L'air était froid, le ciel bas, la mer toujours calme, mais d'un calme différent. Quelques minutes plus tôt, elle semblait endormie. À présent, elle gonflait, montait en puissance. Il n'était plus temps de regretter les canaux paisibles, le vert paradis de la campagne anglaise, la relative sécurité de la Tamise ce matin au lever du soleil, la présence réconfortante de la côte et de la Wilhelmina. Tout ce qu'il leur restait à faire, c'était de garder le cap et de prier pour arriver au port avant que la tempête n'éclate. Frank tenait la barre. Ben demeura près de lui tandis que, dans la cabine, Lotti essayait de réconforter les chiens pris de panique.
Les minutes s'écoulaient, plus longues que des heures. Centimètre par centimètre, de haute lutte, la côte française se rapprochait.
- Calais, souffla enfin Frank, désignant une tache blanche qui se laissait deviner à l'horizon."
La porte se rouvrit, et cette fois apparut une petite dame aux cheveux grisonnants, la soixante avancée. Elle poussa un cri - Albert su qu'il n'oublierait jamais ce cri.
C'était un vrai de surprise, dincredulite, de nostalgie de joie et de peine tout à la fois mais, surtout, c'était un cri d'amour. La dame aux cheveux grisonnants ouvrit les bras et Lotti s'y jeta.
La grand-mère de Lotti l'aimait comme jamais Hubert Netherbury ne pourrait l'aimer.
Et s'il y avait une chose que la guerre avait apprise à Albert, c'est que les enfants ont besoin d'être aimés.