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Critique de clude_stas


Michelangelo Merisi, né à Milan en 1571, est un immense artiste, tellement expressif et au destin épique. Un véritable roman pour ce peintre magnifique du clair-obscur. Il surprend, déroute, séduit, fascine plus de quatre siècles après sa mort, en 1610, entourée de circonstances étranges. Une vie emplie de fureur, de bruit et de violence, une vie de mauvais garçon aux moeurs troubles, qui ne pouvait s'achever que dans l'ombre du mystère. Une mort, tragiquement prémonitoire de celle du poète italien Pier Paolo Pasolini sur la plage d'Ostie en 1975 (bien qu'aujourd'hui, on pense que Caravage est mort dans un lit d'hôpital). Bref, il n'est rien d'étonnant à ce que Dominique Fernandez s'empare de sa biographie pour en faire un roman rythmé, passionnant de bout en bout, jusqu'au dénouement, jusqu'à la suffocation finale. Sincèrement, les oeuvres elles-mêmes suffiraient à éblouir n'importe quel amateur de peinture et il semble étonnant que personne n'ait pensé auparavant à transformer le Caravage en héros de fiction.
Après une enfance passée à Caravaggio, à l'âge de treize ans, il entre dans l'atelier de Simone Peterzano. A vingt ans, il arrive à Rome où il reçoit la protection du Cardinal del Monte, une des personnes les plus cultivées de la ville. A partir de cette date, il est baptisé « il Caravaggio » (un autre Michelangelo avait déjà laissé son empreinte – et quelle empreinte – en art). Mais surtout il va élaborer une peinture en réaction au maniérisme de la fin du XVIe siècle, une peinture non académique, moins théorique, plus sensuelle, plus naturaliste. Mais cette révolution se fait en gardant certains aspects du maniérisme : la tension de la ligne et les contours nets et précis. D'autre part, il va chercher ses modèles dans la rue (des adolescents, des femmes du peuple) ; il introduit une nouvelle gamme de tons gris qui valorisent la force du sujet ; il théâtralise fortement par des jeux d'ombre et de lumière des sujets souvent dramatiques. Bref, il initie un nouveau langage pictural. Ainsi, le Caravage est souvent considéré comme étant l'auteur de la première nature morte, tant il donne une présence aux objets quotidiens, véritables sujets de la toile, aux côtés des enfants de la rue. Ce qui m'amène à me poser la question suivante : un tableau comme « L'Amour victorieux » avec son nu frontal serait-il encore possible aujourd'hui sans encourir les foudres des associations protectrices de la famille ?
Oui, Saint Mathieu est un vieillard, aux mains calleuses et aux pieds crasseux. Oui, Marie-Madeleine est une femme pâlichonne aux cheveux sales. Et les scènes sacrées acquièrent une dimension profane. le Repos de la Sainte Famille devient le moment de pause de n'importe quelle famille. Et le cadavre de la Vierge présente toutes les caractéristiques d'un corps ayant longuement séjourné dans les eaux du fleuve. La face obscure de l'homme est omniprésente, chez les aristocrates, chez les religieux comme dans le peuple. La violence est partout. La solitude également.
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