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Critique de MarianneL


«Il a du naître là-dedans, ce roman, devant ces litres de sang figé.»

De retour dans la ville plusieurs années après les faits, de sa chambre d'hôtel et avec sous les yeux les traces de ses événements qui n'ont pas cessé de l'obséder depuis Juillet 2001 (une carte de la ville, des vidéos, des photos et des documents), un journaliste revient sur ce qui s'est passé cette année-là pendant le sommet du G8 à Gênes. le narrateur venait alors de mettre fin à son histoire d'amour avec Angela, avant de se rendre à Gênes pour couvrir les événements.

Comme le dit Antonio Tabucchi dans sa très belle préface, «ce qui s'est passé durant l'été 2001 à Gênes pendant la réunion du G8 a fait tomber le masque de la «démocratie» italienne.»

Dédoublé entre sa position de journaliste et d'acteur des événements, entre ces quelques jours de juillet 2001 et le présent, le narrateur, navigant sans cesse entre le témoignage et l'introspection, raconte ces moments de sidération où la peur a surgi, où la police, qui était selon lui censée protéger la foule, est devenue l'ennemi, avec la mort de Carlo Giulani et deux jours plus tard l'assaut prémédité d'une violence inouïe des forces de police contre l'école Diaz, où quatre-vingt-treize personnes seront blessées dont plusieurs très grièvement, événements qualifiés par Amnesty International comme la plus grave atteinte aux droits démocratiques dans un pays occidental depuis la seconde guerre mondiale. le lien au présent permet de souligner ce qui a été mis à bas, et une «berlusconisation» de la société italienne qui est devenue la norme.

«C'est que depuis ce jour-là même les nuages n'ont plus eu la même signification pour moi. Et le brouillard non plus. Les nuages et le brouillard, que je m'étais habitué à aimer avec Angela, allongés pour les observer de tous les endroits possibles - il y a seulement depuis l'asphalte d'un parking, un après-midi, que je lui ai dit non, là non, avec tous ces gens autour, quand même [...] Car depuis ce jour-là, les nuages et le brouillard évoquent à jamais l'odeur indescriptible des gaz lancés à Gênes.»

Journaliste et écrivain, Roberto Ferrucci était présent à Gênes en juillet 2001 et il questionne avec cette oeuvre littéraire la possibilité de raconter des événements traumatiques avec simplement des faits, avec un langage journalistique devenu inopérant pour transmettre l'impensable. Alors il explore cette histoire sous les deux angles du factuel et de l'intime, avec une mémoire au fonctionnement bizarre et forcément défaillante, des thèmes chers au grand Roberto Bolaño, et qui font penser à «Amuleto» en particulier.
Un livre qui nous transforme, par ce qu'il raconte et comment il le fait.

«La rue était déserte. Rien que cette épave, là, au milieu, et je me suis rendu compte qu'en quelques heures nous nous étions déjà habitués aussi à ce genre de paysage, à cet ensemble de destruction et de vide qui risquait de se remplir à l'improviste, avec l'arrivée de quelqu'un prêt à s'en prendre à toi sans raison, même s'il était en uniforme et qu'il aurait dû te protéger, pas t'agresser.»
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