Elevé dans la bibliothèque paternelle, qui conserve maints ouvrages, pamphlets, brochures, journaux, caricatures et chansons sur la Révolution française, le jeune
Anatole France a amassé un savoir encyclopédique sur la Révolution. Cette érudition nourrit tous les domaines de cette chronique de la Terreur : arrière-plan politique et militaire, mais aussi chansons, urbanisme, architecture, façons de se vêtir, considérations sur la peinture... C'est une sorte de roman total.
Au moment où Mathiez et Jaurès écrivent une histoire de la Révolution qui réhabilite
Robespierre et la Terreur,
Anatole France, pourtant proche des socialistes, dénonce les excès de cette période et de ses protagonistes.
Son héros s'appelle Evariste Gamelin. Il est artiste peintre, émule de David. Ce n'est pas un assoiffé de pouvoir, ni un enragé. C'est un bon fils qui partage son pain avec les miséreux et aime timidement sa dulcinée. Seulement il est persuadé de détenir la vérité. Ses héros s'appellent David, Marat,
Robespierre. Mais en mauvais peintre, il ne questionne pas ses maîtres. Il se contente de les reproduire servilement.
J'ai aimé dans ce roman le souci de la nuance et du questionnement.
Anatole France oppose à la figure de Gamelin celle de Brottaux, personnage réfléchi et réfléchissant. La prose de France est riche, subtile mais un peu ampoulée et précieuse. On est loin de la sobriété de la peinture néoclassique de David dont Gamelin tente de s'inspirer dans le roman et dont il se fait l'apôtre.