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Critique de Leporella


Pierre France, doctorant en science politique, et Antoine Vauchez, directeur de recherche au CRNS, publient une enquête sur un grand brouillage, qui est particulièrement d'actualité.

Une ministre de l'économie, ancienne avocate internationale, qui recourt à l'arbitrage, pour éviter la justice de l'État et régler un différend entre l'État et Bernard Tapie. Six anciens secrétaires généraux (et adjoints) de l'Élysée qui rejoignent les grands cabinets du barreau d'affaires parisien ; des armadas d'avocats appelés au chevet de l'État pour sécuriser un partenariat public privé ou pour assurer l'entrée en bourse du groupe Areva (avec le succès que l'on sait, des pertes énormes…), par exemple.

Comment ne pas penser à l'ancien maire du Havre, ENArque, avocat, passé chez Areva et, désormais, à Matignon ? Si la frontière entre le public et le privé n'a jamais relevé de la ligne claire, le brouillage a pris récemment une ampleur nouvelle. Une zone de continuité et d'échanges sans précédent s'est créée. L'avocat d'affaires incarne mieux que tout autre ce mélange des genres. Il existe une zone grise à la périphérie des institutions politiques et administratives. Les auteurs pointent des dérives, comme l'influence des réseaux (anciens camarades de promotion, amicales des grands corps) et des think tanks, comme le club des juristes, et une application critiquable du pantouflage. Et une prolifération dans ce secteur de la question prioritaire de constitutionnalité, qui masque en réalité une autre façon de faire du lobbying.

Le droit public économique est une notion qui existe depuis des années (Professeur Farjat et Goldman), qui s'est développée énormément avec François Mitterrand, et, paradoxalement, il y a eu un déclin du droit administratif classique.

Il y a des avocats d'État, comme ailleurs il y a des patrons d'État, dans le secteur économique. Ces avocats d'État se retranchent derrière le secret professionnel pour oeuvrer. Les auteurs suggèrent de maintenir le secret professionnel que pour ce qui touche à la défense judiciaire et à l'assistance juridique, et non pas pour le conseil et le lobbying. Ils reprennent le raisonnement de la Cour européenne des droits de l'homme (arrêt Michaud c./ France du 6 décembre 2012).

Cet ouvrage est excellent, passionnant et très documenté, avec de nombreuses sources et, au surplus, il est d'actualité compte tenu du projet de loi relatif à la moralisation de la vie publique.
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