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Critique de michfred


Encore une fugue, des paysages solaires se succèdent follement au rythme des saisons, pourchassés par la menace de la pluie, l'imminence glaçante de l'hiver, c'est une farandole de toits dorés et brûlants,  une gifle de  mers bleues, des bouffées  de violette et de sel, des éclats de maisons chaulées de blanc  au bord du rivage grec, ou la braise rouge  d'une demeure close sur ses mystères,  enfouie sous la verdure d'un parc abandonné ...

Paysages, pays pas sages, dépaysage pour une fuite éperdue de Léo emportant Mina...

Car aucun écrin ne semble assez beau, aux yeux de Léo, pour conserver, retenir, garder la trop belle Mina.. 

Romanesque  et dévorante passion qui dit la fièvre des corps, la toute-puissance du désir , la torture de la jalousie, la violence de la possession.

 Et la tragédie sans issue de l'amour fou.

 Une version méditerranéenne de Manon Lescaut , et un narrateur, Léo, qui serait l'incarnation moderne, jusque dans les -superbes - dernières lignes, du chevalier Des Grieux.

Quant à  Manon...Mina...on est tout près de l'homonymie...

Léo est aveuglé par la beauté de Mina, il ne voit plus qu'elle, si loin, si près. ..

Si près qu'il ne peut ni la  comprendre ni la deviner, qu' il l'aime d' une passion sans respect ni  satisfaction,   née sur la ruine,  la mort , le saccage de tout de qui l'a précédée.

Si loin qu'il ne se reconnaît plus, coupe tous les ponts, se jette à corps perdu dans l'illégalité,  l'effraction, le braquage, la clochardisaton, la folie.  Une chute vertigineuse.

Mina, elle,  n'est qu'un corps, une odeur, des yeux noirs, une chevelure de feu, une robe légère. La Beauté  comme la verrait Baudelaire, une statue parfaite et sans pitié pour laquelle se consument les poètes.  

Rien à voir avec les personnages de ses  autres romans, aimés, croqués, cernés avec tendresse et doigté par un Fregni empathique et chaleureux.

Mina, comme Manon, Odette ou Albertine,  est un être de fuite,  qui surgit et disparaît avec la même inexplicable autorité, menaçante, cruelle ( " Tu as eu peur?") ,  capricieuse, désinvolte, impérieuse puis tout à coup  enfantine, craintive, tour à tour possessive et indépendante, avide de protection et éprise de liberté . Un mystère. Une contradiction.

Elle est le plaisir et la mort. Éros et Thanatos.

Bien sûr,  on est toujours chez Fregni. La langue est sensuelle, savoureuse, les lieux incandescents, magiques. Mais on l'a un peu perdu quand même, notre René,  dans ce ballet tragique et passionnel.

J'ai parfois un coeur de midinette et j'ai lu d'une traite cette fugue en sol majeur  d'un romantisme échevelé,  mais  j'ai été décontenancée de ne pas y retrouver l'ami familier que j'y cherchais.. .

D'où ce petit bémol dans la notation - je n'y connais rien en solfège, ça fait quoi un bémol sur un sol majeur? Ça fait boum?- mais je n'ai jamais regretté le voyage...j'en reprendrais même une petite taffe, do not bogart that joint, my friend..
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