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Critique de Lulu_Off_The_Bridge


« Il y a eu trop de honte dans ma vie ».
Par ces mots, Furuya, mangaka en panne d'inspiration, pénètre dans l'univers de Yôzô Ôba au hasard de ses errances internétiques. Pages après page, l'artiste se trouve happé dans cette noirceur. Comment le joli garçon de 17 ans a-t-il pu devenir en quelques années un zombie aux joues hâves, solitaire et cynique ? de quelles hontes parle-t-il ? Et surtout, pourquoi Yôzo semble-t-il incapable d'en réchapper ?
Je ne suis pas un homme, arrivé entre mes mains par le bien de la Masse critique Babelio spéciale BD et c'est tant mieux parce que je lorgnais dessus depuis un moment, est la dernière adaptation du roman La Déchéance d'un homme d'Osamu DAZAÏ, écrivain japonais mort en 1948, célèbre autant pour son suicide que pour ses écrits autobiographiques et vigoureusement pessimistes.
Depuis son enfance, Yôzô se définit comme un bouffon. Celui qui grimace sur les photos, invente des tours de potache pour divertir ses camarades. Être un bouffon lui procure une place, une identité qu'il est incapable de trouver autrement. Yôzô en lui-même est « froid comme une pierre », creux et vide plus qu'insensible. « Bouffon », « pitre », il apparaît toujours comme une marionnette, motif qui court le manga de la première à la quatrième de couverture. Pantin de ses parents, de ses amis, des femmes qu'il se persuade d'aimer. Son joli visage lui sert uniquement à ne pas crever de faim et toute sa personne lui inspire haine et mépris. Il est à ce tire saisissant de noter la différence de dessin entre les personnages secondaires aux visages emplis de défauts et de laideurs, et la parfaite figure de Yôzô, lisse, indifférente, quasi anonyme. Matière inerte, les évènements le transpercent sans pour autant le forcer à réagir et ce qu'il fait de mieux, c'est de se regarder tomber. Déchoir. Se perdre. Et il tombe très bas : sa famille le renie juste assez pour qu'il ne leur fasse pas honte, il concoure à la perte de ceux qui lui viennent en aide, il gâche ses talents, se retrouve en prison, à la rue… Incapable de vivre, il est également incapable de mourir, et ce n'est pas faute d'essayer.
ous le crayon de Furuya, les issues - l'amitié, l'amour, l'action politique, l'art – se bouchent les unes après les autres, ne restent que le profit, la manipulation, la solitude qui rend égoïste et mauvais. Marionnettes, donc. le récit enchâssé (le mangaka qui lit l'histoire de Yôzô pour y puiser l'inspiration) tendrait à faire pencher le tout vers une forme de rédemption par l'art qui conférerait une valeur exemplaire à la vie du jeune homme… À peine. Il semble d'ailleurs que Yôzô rédige sa biographie par sadisme autodestructeur, pour jouir de la contemplation de son échec autant que pour cracher à la gueule du reste du monde. Les crayonnés et les aplats d'ombre confèrent à l'ensemble une forme de délicatesse triste où toujours surnage le visage inexpressif de Yôzô.
«Ce premier volume se clôt sur une note en clair obscur, qui laisse Yôzô dans un confort précaire. Je sens que cela ne va pas durer… Vivement le tome 2, prévu pour août 2011.
Lien : http://luluoffthebridge.blog..
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