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Critique de Melpomene125


Émile Gaboriau a écrit le Crime d'Orcival en 1867. Je ne connaissais pas cet écrivain que j'ai découvert par hasard en cherchant des livres électroniques libres de droits et gratuits. J'ai pris grand plaisir à le lire. J'ai fait une petite recherche qui m'a appris qu'il était considéré comme le père du roman policier français. Son enquêteur M. Lecocq a inspiré Arthur Conan Doyle et son Sherlock Holmes, Agatha Christie et son Hercule Poirot, sans oublier Georges Simenon.

J'aime bien de temps en temps lire des romans policiers. En revanche, je n'aime pas du tout l'accumulation de péripéties, rebondissements parfois invraisemblables ou peu crédibles, pour arriver à un dénouement qui me fasse dire : « Tout ça pour ça, aucun intérêt à le relire, une fois qu'on connaît le nom du coupable… » Je n'aime pas non plus l'excès de scènes sanglantes et violentes, les personnages caricaturaux.

Dans le Crime d'Orcival, rien de tout cela pour mon plus grand bonheur. La peinture des caractères et l'analyse psychologique sont d'une grande finesse. Ce roman est bien plus réaliste que ceux d'Agatha Christie, qui me font quelquefois penser à un jeu de Cluedo : qui a tué le colonel Moutarde dans la bibliothèque avec un chandelier ? Dans le Crime d'Orcival, il ne s'agit pas d'un jeu mais d'une description réaliste et satirique de la société.

Qui a tué la comtesse de Trémorel ? Cette énigme est vite résolue, presque aussi vite que dans Colombo. Mais quel est le mobile ? C'est justement là qu'est, pour moi, le talent de l'auteur : arriver à nous tenir en haleine avec son récit, son intrigue fort bien construite et écrite, l'histoire d'une vengeance mais pas que…

La comtesse de Trémorel m'a fait penser à Mme Bovary. Il y a aussi un peu des Diaboliques de Barbey d'Aurevilly (1871), il s'en est peut-être inspiré pour le Bonheur est dans le crime. Ce sera finalement l'inverse du bonheur pour les protagonistes du Crime d'Orcival.

Ce roman est riche des réflexions qu'il suscite sur l'institution judiciaire : la police, la magistrature, l'erreur et l'énigme judiciaires. Il part des stéréotypes en vigueur à son époque pour arriver à une grande finesse d'analyse : la femme d'une beauté fatale mais perfide, passionnée, prête à tout pour se libérer, briser les carcans qui l'enchaînent, l'ingénue qui s'avèrera avoir du courage et un fort tempérament, bien plus que l'homme lâche qui l'a séduite, la mettant au ban de la société du XIXe siècle.

Les discours du maire, M. Courtois, aux habitants d'Orcival, ne manquent pas d'humour. Il s'est retiré à la campagne après avoir fait fortune pour vivre paisiblement mais il s'ennuyait tellement, loin de l'exercice du pouvoir, qu'il a décidé de rendre service à la communauté en devenant le premier magistrat de la ville.

J'ai aimé la fin qui met en valeur l'hypocrisie d'une société fondée sur les apparences et le mensonge : une fille perdue est une dame respectable, dans la mesure où personne ne connaît son secret. le lecteur saura le fin mot de l'histoire mais pas les habitants d'Orcival : le meurtre de la comtesse de Trémorel, veuve éplorée de Clément Sauvresy, restera toujours pour eux une affaire nébuleuse, un mystère, une énigme judiciaire, comme bien souvent dans la réalité car le génie de l'investigation est assez rare. Sans l'intervention de l'agent de la Sûreté, M. Lecocq, et de son acolyte, le père Plantat, juge de paix à Orcival, le juge d'instruction, M. Domini, arrogant et persuadé de tenir son coupable, se serait simplement contenté d'incarcérer les premiers à être arrivés sur les lieux du crime, même s'ils clamaient leur innocence : Jean La Ripaille, braconnier de son état, et Guespin, le jardinier du domaine, qui avait de l'argent à la provenance occulte dans sa poche.
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