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Critique de PhilippeCastellain


‘'Dans une guerre civile, c'est essentiellement votre position géographique au déclenchement qui décide de votre camp'', a dit Hugh Thomas au sujet de la guerre d'Espagne. Mais certains aussi choisissent leur camp tôt, voire très tôt… Et parfois c'était le ‘'mauvais''.

Nous sommes peu après la libération de la France. L'épuration bas son plein. Pour se protéger, chacun essaye de hurler plus fort que son voisin. le héros, Guillaume, déambule un peu perdu dans ce monde en pleine mutation. Il retrouve son amour de jadis, Irène, jeune fille dont le charactère imprévisible fait en grande partie du charme. Sur un coup de tête, tous deux empruntent une voiture et partent en route d'une plage vue jadis sur un tableau flamand du XVIIème siècle. Leur voyage de retrouvaille se ponctue de souvenirs, de discussions aussi impromptues que décousues, et de tentatives (de Guillaume du moins) de renouer les fils qui peuvent l'être.

Au-dessus de cette histoire avortée et d'un récit à peu près dénué d'action, plane en permanence la figure de Robert Brasillach, à peine travesti sous le nom d'Hersent. L'un des écrivains les plus prometteurs de l'entre-deux guerre, critique de théâtre et de cinéma à qui l'on doit l'introduction du cinéma japonais en France… Devenu tête de proue et caution intellectuelle de la collaboration, auteur vedette de ‘'Je suis partout'' où il appelait hebdomadairement à l'extermination des juifs ; arrêté, jugé et fusillé à la Libération ; dont la grâce fut personnellement refusé par De Gaulle malgré une pétition signée par les deux-tiers des écrivains français (dont Colette, Paulhan, Mauriac et Camus).

Comment le jeune homme brillant et charmant peut-il être la même personne que ce partisan acharné de l'ultra collaboration ? Comment ses rhétoriques déroutantes ont-elles pu se transformer en appels au meurtre enragés ? Que fait ce gringalet à grosse lunette avec son sourire d'adolescent au côté de Doriot en grand uniforme SS ? La schizophrénie est totale dans l'esprit de Gadenne, pour qui ces deux images n'arrivent tout simplement pas à se superposer. Et toujours, où qu'il aille, revient cette phrase : ‘'vous étiez amis, non ?''

Gadene n'est pas homme à chercher des excuses ou aligner des explications. Il sait tout de l'homme qui a été fusillé et qui a été son ami. Il hait ses discours. Et il aime l'homme envers et contre tout. L'histoire, déroutante et sans explication, semble n'être là que pour souligner combien cette conclusion est elle-même déroutante et sans explication.
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