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Critique de paroles


Arpenter les rues de Taipei n'est pas une mince affaire, la ville est tentaculaire, ses quartiers nombreux. Modernité et traditions s'y côtoient sans toujours se comprendre, il en est de même pour les habitants locaux et les immigrés continentaux.

Ce sont ici les premières impressions recueillies après la lecture de cet ouvrage contenant huit nouvelles aux thèmes souvent sombres, mais séparées par sept lumineuses chroniques culinaires. Sept petites merveilles de plats typiques aux ingrédients goûteux et parfumés comme le curry Wuyün ou le lait de soja. Sept plats servis par le fin gourmet, Shu Kuo-chih, qui vous promènent dans les différents quartiers de la ville et pourraient servir de guide gastronomique.


- le petit bassin (de Jane Jian) retrace les difficultés d'adaptation à la ville de Taipei d'une jeune femme venant de la campagne. Perte de repères, transports bondés, vie trépidante... l'amènent peu à peu vers la solitude que seule l'écriture pourra sauvée. Mais finalement, elle trouvera son point d'ancrage dans la ville près du petit bassin de sa rue autour duquel les habitants multi-ethniques parlent, échangent, tombent amoureux...
- La rue de Lungch'üan (de Lin Yao-tech) raconte les rivalités amoureuses de deux lycéens, prêts à se battre pour l'amour d'une fille. On y découvre ici la vie nocturne dans un quartier de Taipei où règne une atmosphère angoissante et violente.
- Ça, cette pluie de chagrin (de Walis Nokan) est certainement une des nouvelles qui m'a le plus touchée et qui évoque la discrimination et la quête d'identité. On y retrouve un jeune homme venu des montagnes, retrouvant sa soeur à Taipei pour y poursuivre ses études. Il subit les moqueries et les brimades des autres lycéens et comprendra que sa soeur, dans son travail, subit la loi des autres.
- le mémorial de Tchang Kaï-chek (de Lo Yi-chin) est aussi une nouvelle qui parle de discrimination et de quête d'identité, celle des anciens combattants venus s'installer sur l'île et qui se trouvent perdus face aux Taïwanais de souche. Elle prend pour métaphore, dans cette histoire, l'égarement d'un collégien dans Taipei, ville que pourtant il habite.
- Une histoire de toilettes (de Wu Ming-yi) est certainement la nouvelle la plus fantastique de ce recueil. On se prend tout de suite d'amitié pour ce petit garçon, dénommé Moustique, habitant le marché. C'est un lieu qui grouille de monde et dont les habitants doivent partager les toilettes publiques, même la nuit quand leur vient un besoin pressant. le pauvre Moustique devra affronter ses démons pour y parvenir. On y découvre les us et coutumes des habitants, dont le fameux jeu d'échecs, ainsi que les divinités et croyances dont ils tirent leurs enseignements.
- La carte d'identité d'un inconnu (de Chi Ta-wei) ou comment une bavure policière provoquera la mort d'un jeune homosexuel. Une histoire rageante qui remue les tripes et évoque aussi le problème du sida.
- Videoman (de Chang Wan-k'ang) est certainement la nouvelle qui m'a laissé le plus sur le bord de la route. On y rencontre des jeunes gens que rien ne satisfait, critiquant tout et sûrement un peu perdus dans la vie.
- Retour nocturne (de Chou Tan-ying) est un long poème sur l'amour d'un père pour sa fille. Lui, chauffeur de taxi à Taipei ; elle, étudiante à Paris. Malgré la distance et des choix de vie différents, il est certain que ces deux personnages ont des valeurs communes, même s'ils s'en défendent, et que la solitude les ronge pareillement.

Huit nouvelles donc qui m'ont permis une première approche de l'île dont je ne connaissais que la fameuse marque de commerce "made in Taïwan". Huit nouvelles et huit auteurs différents qui permettent de varier les regards et révèlent les problèmes quotidiens dont Taipei est sujet : juxtaposition de l'ancien et du moderne (architecture), origine de ses habitants (émigrations diverses), problèmes de société (discrimination, racisme, mal de vivre). En fait, autant de problèmes différents que Taipei partage avec toutes les autres métropoles du monde. Mais les décors, les us et coutumes, et bien sûr la gastronomie aux effluves délicates vous emportent bien vite vers des horizons inconnus, vous vous perdez dans l'immensité de Taipei et à chaque coin de rue une rencontre vous attend et vous surprend... N'est-ce pas là une belle façon de faire connaissance ?

Je remercie infiniment la maison d'édition l'Asiathèque pour ce voyage en Chine, et plus particulièrement sur l'île de Taïwan, ainsi que le bureau de presse Sabine Arman pour m'avoir offert ce titre de transport.

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