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Critique de 5Arabella


Ce texte, que j'aime tout particulièrement, est tout simplement de la plus vielle épopée du monde et sans doute aussi le plus vieux texte à proprement parlé littéraire de l'humanité.

Compte tenu de son extrême ancienneté, nous ne disposons sans doute pas du texte dans son intégralité, ce qui nous en reste provient d'ailleurs de différentes versions, pas toutes identiques ni même écrites dans exactement la même langue. Mais peu importe, ce qui nous reste suffit à montrer que dès que l'homme a su écrire il a pleinement été homme et qu'il s'est posé les mêmes questions, éprouvé les mêmes angoisses, ressenti les mêmes joies, et qu'il a eu le besoin de l'art et de la magie du verbe pour le dire.

Cette Épopée de Gilagameš nous parle d'un roi légendaire d'Uruk, ville sumérienne de Mésopotamie, actuellement en Irak, un roi d'avant le Déluge, dont quelques mentions dans des listes royales font penser qu'il a pu exister vers -2700,-2500 av J.-C. Mais comme pour le Charlemagne de nos vieilles chansons de geste, le personnage réel n'a rien à voir sans doute avec le personnage de littérature qu'il est devenu, magnifié et héroïsé par les scribes.

Les premiers textes qui évoquent Gilagameš ont été composés vers la fin du III millénaire en sumérien, il s'agit d'épisodes isolés consacrés à certaines de ses aventures et qui reprennent sans doute des traditions orales.

La première version de l'Épopée en tant que telle semble avoir été composée par un seul auteur dans la Babylonie du XVIII ou XVII siècle av. J.-C. en akkadien. Ce sont des tablettes du VII siècle avant notre ère conservées dans la bibliothèque du roi assyrien Assurbanipal à Ninive découvertes au XIXème siècle qui nous ont en grande partie permis de redécouvrir ce texte extraordinaire, complété par d'autres versions plus ou moins partielles, car ce texte fût fameux pendant des siècles et des siècles, et il a été souvent reproduit.

Il s'agit donc de nous conter l'histoire de Gilagameš, roi d'Uruk « Pour deux tiers, il est dieux, pour un tiers, il est homme », un tyran plus qu'un roi, tellement dur pour ses sujets que ces derniers vont se plaindre au dieu Anu. Les dieux pour le contraindre à plus de modération, vont créer Enkidu, mi-homme mi-bête, qui va être capable de tenir tête à Gilagameš, qui ne pourra pas le battre en duel. Ils vont devenir amis, plus proches que des frères, et ensemble accomplir des exploits sans nombre.

Mais ils vont dépasser les bornes de ce qui est permis à des hommes et offenser les dieux qui vont faire mourir Enkidu. Cette mort terrorise Gilagameš , qui refuse qu'il lui arrive la même chose, il part donc à la recherche de l'immortalité, et pour cela se lance dans la quête de Uta-napisti, l'homme qui a survécu au Déluge et qui est devenu immortel. Gilagameš affronte de grands dangers pour le retrouver mais Uta-napisti ne peut lui donner l'immortalité, pour l'en convaincre, il lui fait le récit du Déluge. Gilagameš finira par accepter le sort commun des hommes et reviendra à Uruk pour y finir sa vie.

Ce n'est bien sûr qu'un très bref résumé de ce texte riche et complexe, qui a été pendant longtemps lu et raconté. Une partie au moins a été intégré dans notre culture, le récit biblique de la Bible reprend en effet une bonne partie du récit du Déluge mésopotamien, ce qui choqua terriblement au XIXem siècle: la Bible ne serait pas le plus vieux texte de l'humanité, et en plus une partie aurait été copié sur un texte païen (et non pas inspiré par la parole divine !).

Quelques mots aussi sur la traduction, personnellement je possède la très belle version de Jean Bottero, dont j'ai peur qu'elle ne soit plus disponible, elle est très littéraire, ce qui est un choix assumé de Bottéro, qui explique qu'il souhaitait s'adresser à des non spécialistes. Je suis personnellement une grande admiratrice des travaux de ce grand assyriologue, qui joint à une immense érudition une écriture magnifique, élégante et raffiné, et qui arrive à mon sens à faire passer une grande passion pour cette vielle culture de la Mésopotamie ancienne si mal connue et si mal aimée.
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