page 11 : D'abord, il y avait eu cette enfant silencieuse.
Assise dans l'herbe, près d'un acacia dont le tronc très droit me fascinait, je passais des heures à observer notre ferme. Isolée au milieu des champs de maïs, de blé, de tabac.
Accompagnant mon père aux champs, entretenant la maison, préparant les repas, elle parlait peu, cette mère adorée que je ne quittais pas du regard, aussi muette qu’elle.
Maman ignorait pourquoi elle m’avait donné un prénom plutôt qu’un autre. Ma venue au monde avait donc si peu compté ? Ce « je ne sais pas » n’avait plus cessé de me torturer.
Il m’est difficile d’accepter que tout soit joué, de n’avoir plus de prise sur rien, d’être restée en rade loin de mon père, détournée de son chemin. Perdus l’un pour l’autre, à jamais.