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Critique de jcjc352


La mala hora ! le mauvais moment ou la mauvaise heure et peut importe la traduction. Gabriel Garcia Marquez nous signifie tout simplement que certains jours gagneraient à être vécus couchés au lit, seul ou accompagné. Mais qu'en est-il vraiment? Il semblerait que ce dernier cas, malheureusement, « la méridienne accompagnée » loin de reposer les esprits, soit la cause d'un affichage de tracts mettant à jour publiquement les frasques des uns et des autres avivant des animosités déjà bien exacerbées.
Et cela, dans un pays équatorial où, au climat moite et collant auquel s'ajoutent des crues à moustiques et émanations malsaines (sans parler de la vache crevée qui fait le crawl sur le fleuve et vient justement, fait exprès, se coincer dans les herbes sous les fenêtres des habitants), où s'épanouit une population chaude, fière et catholique un peu coincée mais très portée sur les apparences et très sujette aux opinions politiques extrêmes et où tout cela ne pardonne pas

Lorsque « l'entrecuisse » se mêle à la politique, surtout lorsque prise comme prétexte, l'issue est prévisible!

Un style et un sujet assez semblable à « chronique d'une mort annoncée » mais élargi à l'ensemble du village avec comme corrélation la politique en fond de tableau et non plus le seul crime d'honneur
Village qui est petit, difficile d'imaginer sa grandeur par sa structure administrative: maire maffioso/6 policiers (véritables repris de justice) et un juge ainsi que religieuse : un curé. Structure villageoise si volatile et précaire mais qui donne l'impression d'être plus grosse qu'il n'y paraît grâce à une certaine effervescence et activité sociétale. Difficile d'imaginer que dans ce petit bourg, véritable arène de cirque sociale, il y ait une charge dramatique latente aussi intense ainsi qu'une densité aussi humaine et pourtant.
Grand narrateur Gabriel Garcia Marquez n'a pas son pareil pour nous parler de l'ambiance bien particulière de ce pays sud-américain. Moeurs à la fois légères dans les faits et tolérantes par nécessité, il y a si peu de distractions, mais rigoriste dans l'apparence sociale et donc pour vivre heureux vivons cachés. Une population portée sur les arrangements et l'humeur du moment plutôt que sur le droit et sa constance et susceptible fatalement de forte corruption et d'actes inconsidérés.

Gabriel Garcia Marquez narre cette fable tragique mais aussi cynique parfois comique pour dissimuler des émotions , avec un certain fatalisme mais beaucoup de doigté: c'est l'aspect humain de l'individu qui prévaut.
Une glu poisseuse cimente inextricablement les habitants, habitants arque-boutés sur leurs certitudes, sur leurs rancunes nées de massacres et contre-massacres incessants politiques doublés de crimes d'honneur ou bien surtout l'inverse et sur le « qu'en dira-t-on ».
Une activité économique qui n'a rien de marquante, sans intérêt, une pauvreté notoire même pour les plus riches, des divertissements restreints : le cinéma, censuré par l'église à grands coups de cloches, loto et billard au troquet du coin et donc un épanouissement inexistant des individus qui vivent au jour le jour, acculés dans la fournaise colombienne à la farniente et au perruquier pour les plus fortunés.
Restent la discussion politique, la pratique religieuse et la fornication amoureuse même sans choléra mais à la fraîche. Trois pratiques qui sont les mamelles de la pauvreté, les unes malheureusement imbriquées dans les autres et pas pour le meilleur!
Après avoir lu le livre il reste dans la bouche un petit goût amer: la vie et l'humanité qui jamais ne changent et restent toujours aussi primitives. Pas De paradis équatorial mais plutôt un enfer avec les autres forcés de cohabiter et régit par les mêmes réflexes ataviques, violents et impérissables. Gabriel Garcia Marquez nous fait un tableau, comme souvent d'ailleurs, de sa Colombie par « temps gris » tel Manet avec son « lilas temps gris » mais contrairement à lui rarement une Colombie « au soleil» et c'est un peu frustrant mais on n'en apprécie que mieux notre climat tempéré. Il ne porte pas de jugement mais constate que la vie c'est comme ça: une mauvaise farce et il n'y a rien à y faire!
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