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Critique de Bazart



"Six feet under m'a appris à pleurer".

Ainsi commence Six feet under, nos vies sans destin, le nouveau ouvrage de Tristan Garcia, écrivain et philosophe français (auteur notamment de la meilleure part des hommes), par cette phrase à laquelle je ne peux que totalement adhérer (et ce, même si, contrairement à Garcia, j'avais déjà déployé mes glandes lacrymales avant elle).

En effet, à mes yeux, cette série, fruit des géniaux studios HBO, est incontestablement située à des années lumières de toutes les autres existantes, la seule qui ait eu sur moi des résonances insoupsonnées, et la seule qui m'a laissé l'impression, lorsque la série s'est achevée, de devoir abandonner une véritable famille.

J'ai vu cette série en DVD sur plusieurs années, de 2003 à 2006, je me souviens notamment avoir vu le tout dernier épisode, lacrimogène au possible, avec mes larmes coulant sur les joues de mon fils, alors nouveau né, que je berçais, tout en regardant la télé

Et si cela fait plus de 6 ans maintenant que j'ai quitté à regret la famille FIsher, l'empreinte qu'elle a laissé sur moi n'a jamais complétement pu s'effacer.

Le mérite de l'immense réusite de la série en revient avant tout à Alan Ball, déjà scénariste de l'extraordinaire "American Beauty", nous régalant à nouveau par son intelligence, sa finesse et son imagination.

"Six Feet Under", c'est d'abord une réussite à fait ébouriffante et délectable, que ce soit dans les personnages, tellement différents qu'ultra-complémentaires, tous interprétés de sublime manière, un humour noir souvent dévastateur, des dialogues finement ciselés et une créativité hors pair que je n'ai jamais retrouvé depuis, ni dans la série, ni même dans le cinéma.

Ainsi, pour me replonger dans l'univers de cette série, j'ai pu lire, grâce aux éditions PUF (un grand merci à eux), l'essai de Tristan Garcia sur le sujet.

Alternant portraits des personnages, analyse des épisodes les plus marquants et étude des grands thèmes explorés, le romancier livre une analyse fine et captivante sur la série qui aura réussi, mieux qu'aucune autre sans doute, à raconter «nos vies sans destin».

L'ouvrage se décline en six "thèmes", : l'individu, la famille, le travail, l'amour et la sexualité, la mort, le sens de la vie. Et à travers ces 6 pôles, Garçia, nous démontra qu'une des grande réussite de «Six Feet Under», c'est d'avoir fait de l'ordinaire quelque chose qui n'est absolument pas ennuyeux.

Et parallèlement, la série a réussi le tour de force de ne pas en avoir fait de leçon de morale ou un manifeste de coaching personnel sur un sujet qui aurait pu y prétendre. Par ailleurs, Garcia insiste sur la choralité de l'oeuvre, qui a réussi, plus que tout autre à traiter également tous les individus, même ceux en apparence plus dans leur recherche de singularité. J'adore les films choraux de Shorts Cuts à Magniolia, mais ici, les 56 épisodes de 52 minutes peut évidemment permettre de développer et de voir évoluer leurs personnalités, comme aucun long métrage de cinéma ne pourrait le faire, et toujours avec le souci constant de l'authenticité.

L'auteur va jusqu'à affirmer, et je suis totalement d'accord avec cette affirmation, que " si on se demandait un jour à quoi ressemblait la vie ordinaire des gens conscients au début du XXIe siècle, on pourra dire : voici, et montrer les cinq saisons de cette série".

Réussir à raconter la vie intime de gens qui a priori ne touche qu'une petite partie des gens et atteindre à ce point l'universel, c'est vraiment le grand tour de force de cette série que Tristan Garcia arrive formidablement à retranscrire dans son ouvrage qui a le grand mérite de mettre une trace dans une série définitivement moins populaire que Friends, les Soprano ou Lost, qui a énormément compté, et continue toujours, de compter pour moi.
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