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Critique de Acerola13


J'avais beaucoup apprécié l'Education européenne de Romain Gary, j'étais donc curieuse de découvrir son Europa (a priori peu de changement thématique si l'on s'en tient au titre!)...Dont la lecture, il faut le dire, est un peu déroutante.

On y fait la connaissance d'une foultitude de personnages qui semblent se compléter, s'associer, se dissocier, et l'on se demande au fur et à mesure des pages lesquels sont réels, et lesquels le sont moins. Danthes est aux prises avec Saint-Germain et le Baron, Malwina et Erika semblent les deux facettes d'une même pièce, Jarde se confond avec les citations freudiennes de l'ouvrage.

Si le lecteur espérait se rattraper à l'unité de temps ou de lieu face à cette débauche de personnages, c'est peine perdue : on ne sait jamais vraiment à quelle époque on est (avoir un personnage qui assure avoir vécu plusieurs siècles et connu tout le gratin central et est-européen n'aide pas), et lorsque l'on croit être à un endroit (prenons Florence), le personnage s'éveille subitement : c'était un songe, c'était une hallucination.

Le récit est donc heurté de ces incessants allers et retours temporels, de ces scènes jouées une dizaine de fois : l'on ne sait plus si l'on est dans un roman, dans une répétition théâtrale ou dans un film en train d'être monté sur adobe Premiere...

Le lyrisme à outrance et les très longues descriptions de l'auteur m'ont à la fois agacée et apaisée : lorsqu'elles sont culturelles ou mobilières, elles m'ont fait penser à un Huysmans moins cynique qui voudrait faire déborder son savoir de chaque page, tandis que les descriptions de paysages m'offraient elles un moment de répit dans cette lecture décidément bien sans dessus dessous.

Vous l'aurez probablement deviné, j'ai mis des mois à venir à bout de cette Europa, et j'ai sérieusement songé à l'envoyer valdinguer. J'en retiens quelques passages jouissifs, notamment les passes d'armes politiques et idéologiques entre Danthes et son fils, deux trois évocations d'oeuvres d'art qui m'ont fait sourire, et surtout une critique déjà sévère de la dualité et de l'hypocrisie européenne pétrie de culture et pourtant incapable de refuser la violence en son sein.

On pourrait discourir longuement sur la vision de la femme proposée par Gary dans cet ouvrage, pas vraiment glorieuse : la sensualité y est sans cesse liée à la manipulation et à la rancoeur ; les personnages féminins se contentent d'être une épouse délaissée, une sorcère malfaisante ou une jeune innocente salie dans ses momens d'oubli.

Une lecture pas franchement moderne a posteriori, pleine d'une suffisance d'un autre siècle et portant un regard franchement conservateur sur la sexualité, bref, plutôt malaisante pour moi. Mais les romans sont aussi là pour secouer leurs lecteurs...
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