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Critique de Osmanthe


Romain Gary lance ici sa carrière littéraire. Occupant encore en 1958 des fonctions diplomatiques, il signe prudemment, déjà, d'un pseudonyme, celui de Fosco Sinibaldi.

C'est que le propos est de dénoncer la complète inefficacité de l'O.N.U., plombée par son objectif premier de long terme, qui serait de survivre elle-même en temps qu'institution à toutes les crises qu'elle est censée contribuer à résoudre, et donc de jouer la carte de l'immobilisme. Il est d'ailleurs bien difficile de sortir de ce carcan dès lors que les américains et les russes sont présentés comme s'entendant pour ne jamais être d'accord et empêcher ainsi que les choses bougent afin de préserver leur leadership, leurs zones d'influences respectives, et galvaniser leurs opinions publiques.

Pour dénoncer cette situation, Romain Gary montre déjà dans ce roman aux allures de conte philosophique le sens de l'absurde et du paradoxe dont il fera grand usage par la suite.
Son héros Johnnie est un jeune cow-boy texan venu faire des études à New-York. Adhérant à l'idéal en principe défendu par les Nations Unies, il trouve le moyen de s'installer clandestinement, avec sa colombe, dans une petite pièce cachée au coeur du bâtiment siège de l'O.N.U. Mais il se rend vite compte de la paralysie complète de l'institution. Visité puis entouré par son amie Frankie et quelques fidèles complices, il décide de sortir de l'ombre et d'orchestrer une fausse grève de la faim pour décrédibiliser l'instance internationale.
Il devient alors un véritable héros aux yeux des peuples du monde, des dons d'argent affluent à son profit...mais quand il décide de mettre fin à la plaisanterie en dévoilant sa supercherie, personne ne l'écoute, il est devenu définitivement un objet d'adoration. C'est le début d'une descente aux enfers pour cet authentique adepte des beaux idéaux...

Bien sûr, ce n'est pas encore du très grand Gary. Il se cherche un peu, retient probablement les coups, se répète et nous explique parfois trop son idée force, comme s'il craignait qu'on ne l'ait pas compris immédiatement, ce qui alourdit le propos et en réduit l'impact à mon avis.

Pourtant j'ai trouvé ce roman intéressant en ce qu'on y sent déjà la patte et la pâte stylistiques du futur écrivain de métier Romain Gary, et surtout parce que son analyse et sa clairvoyance des relations internationales et des rouages actionnant la diplomatie sont remarquables...d'autant plus que ces "principes" sont clairement toujours à l'oeuvre aujourd'hui dans cette institution, aussi vénérable que frileuse et trop souvent démunie parce que trop facile à bloquer dans ses résolutions par l'emploi facile du droit de véto par les grandes puissances.

Une vision qui sent l'humanisme, la défense de l'esprit d'indépendance et de grandeur de la France, aux accents pro-gaullistes du bonhomme (à un moment il fait dire que la France a manqué une occasion de s'impliquer), mais aussi derrière l'humour un regard déjà un peu désabusé et pessimiste sur la marche du monde.
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