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Critique de Sachenka


« Charles, tu sais parfaitement que je ne me suis moqué de personne, et si je fais ce qui me plait c'est que cela ne nuit qu'à moi. » (p. 150) Cette phrase, énoncée par le narrateur Michel vers la fin du livre, et dans un contexte bien précis, peut cependant s'appliquer à l'ensemble du roman. C'est que, tout le long, je cherchais un sens à cette histoire que me racontait André Gide. Quel sens donner à cette vie qu'il me présentait. Michel, maladif, voyage en Algérie, puis en Italie. Il frôle la mort et se reprend peu à peu. Il visite sa ferme familiale en Normandie, y reste un certain temps, afin de mettre un peu d'ordre dans les affaires. Puis il va à Paris où il occupe une charge dans un établissement d'enseignement. Puis il retourne en Normandie. Toutes ces pérégrinations, pourquoi ?

Eh bien, Michel, il fait bien ce qu'il veut, peu importe les conséquences (même pour lui-même), peu importe une quelconque morale. Non pas qu'il soit méchant et cherche à faire mal ou à nuire aux autres, non. Mais cette absence de morale est troublante. Et on le remarque dès le début. Même malade, il est en pleine possession de ses sens, il remarque des choses qui échappent à tous. Il porte une attention particulière à des jeunes garçons qui lui rendent visite. Je m'attendais à voir se développer une relation homosexuelle (au siècle dernier, n'associait-on pas la « pédasterie » à un manque de moralité ?). Mais non, fausse route.

De plus, le narrateur échange philosophie avec Ménalque, un ancien ami retrouvé. Parfois ils s'entendent, d'autres fois ils discutent violemment. Certaines des prises de positions me semblaient fortes… controversées… méprisant l'ordre établi, les conventions, les bonnes moeurs. Mais son ami part à l'étranger et le narrateur retourne en Normandie, agit de façon étrange (il traine avec un braconnier et se met à dos les paysans et la famille de son métayer, puis vice-versa). Ces péripéties bêtes, pourquoi étaient-elles là, sinon pour exprimer l'ennui du narrateur. Finalement, c'est sans doute ça, l'immoralité : une certaine inaction, un désoeuvrement qui ronge l'âme au point de la rendre inerte. Peu importe où il se trouve, la passivité, l'oisiveté le prend et lui enlève toute force vitale, tout sens de bien et de mal. Il n'en reste qu'un quelconque besoin de se divertir un peu. Ou, alors, le triomphe de la liberté, de la volonté intérieure.

Mais tout n'est pas fini. Dans ce si bref roman, c'est qu'il s'en passe, des choses ! Après tout ça, c'est la maladie de sa femme qui le pousse à retourner en Algérie. Là même où l'histoire avait commencé ! Mais les événements se bousculent, le narrateur se perd un peu… ses forces physiques et mentales l'abandonnent à nouveau, il se tourne vers l'autodestruction. Finalement, L'immoraliste, c'est l'histoire d'un type sans morale, comme si rien n'avait de prise sur lui. Ou, du moins, c'est ainsi que je l'ai perçu. Au tournant du 20e siècle, André Gide soulève plusieurs questions. Un peu prévoyant, car ne dit-on pas que la modernité a provoqué la chute de la moralité ?
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