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Critique de Sofiert



En s'appuyant sur le traumatisme de la pandémie et du confinement, sur la menace du terrorisme et sur les ravages du réchauffement climatique, Julia Glass précipite ses lecteurs dans une Amérique terrorisée par l'avenir, une Amérique de 2034.
L'écart entre notre présent et ce futur dystopique est si minime que la convention littéraire n'a d'autre mission que d'accroître l'angoisse du lecteur face à des menaces de plus en plus réalistes.

Cette plongée dans un futur proche est d'autant plus percutante qu'elle se concentre sur une Amérique protégée, une petite ville blanche où le temps semble s'être arrêté, une bourgade portuaire où il fait bon vivre. Dans cette ville fictive, Virgil Harbor, dans ce décor si familier dans l'imaginaire américain, l'auteure nous présente des habitants qui vont s'exprimer successivement sur les crises personnelles qu'ils ont vécu et sur celles qu'ils vont vivre suite à l'arrivée de 2 intrus.

Les premières lignes donnent le ton: "Imaginons que la géographie décide de nos destinées, que les lieux façonnent nos personnalités." Ainsi dans ce havre de paix, les personnages de Julia Glass tentent de donner le change, de préserver leur bulle puisqu'ils ont gagné à " la loterie géopolitique " en étant sur un promontoire qui n'est pas menacé par la montée des eaux.
Malgré cela, les habitants ont déjà été confrontés à des crises. Pour Brecht l'étudiant , il s'agit d'un attentat auquel il a miraculeusement échappé mais qui a tué son ami. Austin, son architecte de beau-père, a connu une histoire d'amour qui s'est terminée tragiquement. le mariage de deux couples est en train d'exploser, alors que des familles choisissent l'école à la maison pour ne pas exposer leurs enfants aux violences du monde. Celestino, le paysagiste, même s'il est inséré dans la vie de la communauté, sent toujours peser la menace d'une expulsion.

L'architecture des premiers chapitres est d'une grande densité et risque de perdre quelques lecteurs. En effet, l'auteure a choisi de dérouler la vie de 9 personnages, projet ambitieux qui prend tout son sens au fur et à mesure de la lecture. Lorsque le puzzle se met en place, et surtout lorsque les deux étrangers apparaissent, les problèmes du monde viennent fusionner avec les problèmes de chacun.
Autour de l'éco-terrorisme, qui n'est absolument pas justifié mais qui trouve cependant des circonstances atténuantes vu la gravité de la situation, Julia Glass transporte ses personnages dans un thriller à l'humour ciselé qui révèle la force de résilience de chacun.
Brecht, de retour à New York, s'adresse en pensée à sa mère :" Si je detaillais, je dirais ceci: je suis sur une ile dont la côte est menacée, il y a des gardes, des flics, des rangers et toutes sortes de gens en uniformes qui surveillent, il y a des bassins écrêteurs là où il y avait autrefois des terrains de basket, il y a des periodes estivales où les températures atteignent 38° C cinq jours d'affilée, et on est peut-être menacé de tempêtes, de bombes, de contagion, de pandémies et de pagaille, mais je vais bien. "

On ne peut échapper ni au passé, ni à l'avenir. Mais la manière dont des catastrophes peuvent séparer mais finir par rassembler des êtres humains est le message optimiste qui vient contrebalancer les constats terribles dressés dans ce beau roman.
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