Mon anesthésiant n’était ni l’alcool, ni la drogue, ni l’ego, ni même le sexe, non que je n’aurais pas eu recours à certains d’entre eux.
Il s’agissait plutôt d’une décoction composée à parts égales d’un mélange de ténacité et d’obstination rompues à toute épreuve, le tout accompagné d’un bon vieux bouquet garni d’allez-tous-vous-faire-foutre.
Absorbé dans ses pensées, il disparut en lui-même. Sans doute là où vont les narcissiques, l’endroit qui leur permet de s’apitoyer sur leur sort même en apprenant la mort de quelqu’un d’autre.
Micaela ( ...) était devenue ma femme, puis mon ex-femme, avant de s'éterniser dans ma vie telle une infection chronique des sinus. De temps à autre, elle réapparaissait pour me proposer de regarder un film, film suivi de quelques whiskies chez Tilla et d'environ une heure de batifolage dénudé dans sa grande chambre avec vue sur le lac Harriet. Après quoi, nous reprenions nos chemins séparés , mais la fièvre me mettait KO pour des semaines.
La légiste, Julie Swenson. En général, elle travaillait sur les cadavres de Minneapolis. Je l'avais rencontrée à plusieurs reprises à la morgue du comté de Hennepin. Elle avait de longs cheveux gris et un regard teinté d'un soupçon de bleu. Elle devait avoir plus de cinquante ans. D'habitude, je m'en tiens à des femmes de moins de quarante, comme moi, mais quelque chose dans l'honnêteté de sa chevelure m'incitait à tomber amoureux d'elle. Peut-être le lui avouerai-je un soir à la morgue, quand elle n'aurait pas la scie à os à la main.