L'odeur que laisse un incendie est à la fois étrange et familière. Elle pourrait sembler anodine en premier lieu, comme les restes d'un feu de joie ou de camp. Mais il flottait au-delà quelque chose de plus pénétrant, de plus déconcertant, comme la sensation qui s'attarde après un cauchemar : le souvenir de la terreur, d'abord intense puis s'estompant peu à peu.
Soudain, j'avais treize ans, j'avais fini l'école, et le monde entier s'ouvrait devant moi comme une autoroute. Je voyais les choses ainsi : le chemin de terre qui filait vers l'est à partir de la rivière, celui qui ondulait, serpentait et offrait des ramifications vers d'autres chemins de terre, déboucherait sur le Maine, la destination choisie par Betsy.
La plupart des filles de treize ans auraient tourné leurs yeux pleins d'étoiles vers l'ouest, nourries par d'innombrables nuits d'hiver passées à lire, pelotonnées sous des couvertures, les aventures de pionnière de Laura Ingalls Wilder. Mais pas Betsy Parker. Bertsy était une aventurière du réel. Elle connaissait ses limites, était capable, était capable de distinguer le fantasme de la potentialité. Lorsqu'elle projetait de faire quelque chose, elle allait jusqu'au bout. Une qualité que j'adorais chez elle tout en la redoutant.
J'enfourchai mon vélo et sortis lentement de la ville, remarquant pour la première fois que les feuilles avaient commencé à tomber. J'en fus surpris. Je ne ratais jamais le passage de l'été à l'automne. Comment avais-je pu ignorer une transformation aussi spectaculaire, ces mille nuances de rouge et d'or, cette combustion spontanée ?