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Critique de meeva


Nous nous sommes connues Christelle et moi, au lycée, par le hasard de quelques amies communes.
Nous nous sommes fréquentées, parce que nous n'avions rien en commun, à part cela : pas d'incompréhension, pas de jugement.


Elle était, au collège, de celles qui harcèlent les autres filles dans les chiottes, le genre dur et pas fréquentable.
Elle avait un père qui tapait sa femme, alcoolique, chasseur, raciste, pas forcément dans cet ordre. Ça fait cliché, je sais, mais c'était ça. Juste ça.
Sa mère était une « pauvre femme », alcoolique et joueuse (elle taxait de l'argent à ma mère pour le jouer au PMU).


Sa révolte à Christelle consistait à fréquenter de « mauvais garçons », fumeurs, tolards, ce genre là… à découcher la nuit, à conduire sans avoir le permis (sans avoir 18 ans), à fumer des joints.


Invitée à son anniversaire, toute la soirée, je m'étais demandé ce que je faisais là : je ne connaissais personne d'autre qu'elle, j'étais hyper timide et je ne comprenais toujours pas pourquoi elle m'avait proposé de venir.

Non motorisée, je devais dormir chez elle. La nuit, on a entendu sa mère se plaindre, geindre, « arrête », disait-elle à son mari. Christelle s'était assise sur son lit, les jambes repliées, le menton sous les genoux et elle se balançait d'avant en arrière en se bouchant les oreilles avec ses mains. Bon anniversaire, Christelle.


Un jour, Christelle m'a dit que quand son père s'endormait sur une chaise du jardin, avec son fusil sur les genoux, elle rêvait de le tuer d'un coup de fusil. Elle détestait savoir qu'il tuait des animaux, elle qui les aimait tant.

Un jour, son père a ramené de la chasse un marcassin. Ils avaient tué la mère, par erreur. Elle a nourri cette bête au biberon, il vivait dans la cuisine, je l'ai vu. Puis quelques semaines après, quand elle m'a remontré la bête, j'étais enfermée dans l'abri de jardin et elle munie d'une barre de fer, parce qu'il était un peu brutal… un sanglier qu'elle câlinait comme si c'était un chien.


Mais elle avait le genre BB, Christelle. Son racisme à elle, c'était les arabes.

Je me souviens d'une conversation dans la cour du lycée. Enfin, je ne me souviens pas vraiment de la conversation, juste de sa fin, quand Christelle m'a dit :
« Quand tu te seras fait violée par un arabe, tu ne diras plus la même chose. »
Là, il n'y a pas à discuter, j'ai juste dit « t'es conne » et je me suis barrée.


Je me suis souvent demandée si ça valait le coup de discuter, de se fâcher. Et puis j'ai pensé que non.
En ma présence, Christelle évitait les remarques racistes qu'elles faisaient ordinairement avec sa copine Stéphanie, du genre « accélère » quand il y avait un type basané sur un passage piéton.
C'était peut-être de l'hypocrisie et c'était juste moche.
Mais c'était peut-être pour épargner ma sensibilité et alors ça prouvait bien qu'elle en avait une de sensibilité.


Encore maintenant, il m'arrive de me demander ce qui me rapprochait de Christelle.
Ce qui m'énervait par-dessus tout, c'était qu'elle déteste autant son père mais qu'elle ait gardé de lui un de ses principaux défauts : le racisme.
Mais la vérité, c'est que Christelle était une fille épatante et super attachante pour tout un tas d'autres raisons.


Bref ! Quand j'étais jeune, j'ai essayé la peau d'une raciste et elle ne m'allait pas.




Ce qu'il y a d'épatant dans le livre de John Howard Griffin, ce n'est pas le style, qui m'a paru un peu pataud – comme d'hab, je ne saurais pas analyser pourquoi et ne tenterai donc pas de le faire.

Par contre, par son contenu, il est épatant.
John Howard Griffin, un homme blanc, se dit qu'il faut prouver, prouver j'insiste, que le racisme existe dans certains états, et de prouver, prouver j'insiste encore, que ce racisme est injustifié.


Il décide de se transformer en noir, à l'aide d'un médicament, de rayons et de crèmes colorantes, pour se fondre parmi les noirs, s'immerger dans les ghettos noirs.

Et ce qu'il décrit, ce n'est pas seulement la ségrégation, ce ne sont pas seulement les privations, ce n'est pas seulement la pauvreté, c'est aussi le changement d'état d'esprit, le changement de comportement, le changement de ressenti qui s'opère presque immédiatement en lui lorsqu'il est devenu noir.

Alors il nous montre, par son exemple, que les noirs sont tout à fait égaux aux blancs… jusque dans leurs défauts. Une fois redevenu blanc, il ne sera pas mieux accepté par les noirs…

Mais bien sûr, la force, à ce moment et en ce lieu, est aux blancs. Ce sont eux qui détiennent le pouvoir et son but est bien de forcer la population américaine à ouvrir les yeux, en leur donnant accès par les médias à la réalité, indiscutable à ses yeux : il n'y a aucune différence entre un noir et un blanc de par la couleur de la peau.

Par contre, il ne nie pas les différences de comportement, mais les explique par un accès inégal à l'éducation, à la culture, par la réaction à la ségrégation et au racisme…

Et il demande de comparer un mauvais noir à un mauvais blanc, un bon noir à un bon blanc, pour constater qu'alors, il n'y a pas de différence.


Inutile de chercher à tout dire de ce livre en quelques lignes…
A lire pour ceux que ça intéresse.





Ma grande, Lili, a appris cette chanson cette année. C'est dire que je la connais par coeur moi-même…

« Armstrong je ne suis pas noir
Je suis blanc de peau
Quand on veut chanter l'espoir
Quel manque de pot
Oui j'ai beau voir le ciel, l'oiseau
Rien, rien, rien ne luit là-haut
Les anges… zéro
Je suis blanc de peau
[…]
Armstrong, un jour, tôt ou tard
On n'est que des os
Est-ce que les tiens seront noirs ?
Ce s'rait rigolo
Allez Louis, alléluia !
Au-delà de nos oripeaux
Noirs et blancs
Sont ressemblants
Comme deux gouttes d'eau. »

Extrait de « Armstrong », Claude Nougaro :
https://www.youtube.com/watch?v=TqzmrgBU6bE
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