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Critique de vibrelivre


L'étrange voyage de R.L.STEVENSON
Fabien Grolleau & Jérémie Royer
Bande dessinée, biographie romancée
Dargaud 2021, 200 planches


le scénariste et le dessinateur-coloriste, fascinés par Stevenson, s'intéressent à la création au XIX°. Ils retracent la courte vie de Stevenson, connu pour L'Ile au trésor, et L'étrange cas du Dr Jekill et de M. Hyde.
Stevenson est né en 1850 à Edimbourgh et mort à Samoa en 1894.
La BD commence par l'enterrement de Stevenson aux îles Samoa, au sommet du mont Vaea, et se termine par sa mort, en plein travail d'écriture.
Puis, par un flash-back, les auteurs reviennent vers sa vie, en citant dans le texte des morceaux, originaux ou adaptés, de Robert Lewis Stevenson. Mais le récit n'est pas linéaire. En parallèle, il y a le journal-carnet de voyage de Fanny van de Grift Stevenson, une peintre américaine dont il fait la connaissance à Barbizon, une femme plus âgée que lui, mère de deux enfants, qui a divorcé. Elle aussi est une créatrice dans son genre, aménageant un lieu pour vivre et cultivant légumes et fruits. Elle est sensible à la nature, comprend l'âme des lieux, est appréciée des Samoans. Mais aussi, elle est une âme littéraire qui a su transformer par ses encouragements un récit distrayant en chef d'oeuvre, L'étrange cas du Dr Jekill et de M. Hyde.
C'est un enfant chétif – il est né d'une mère tuberculeuse et mélancolique- qui déborde d'imagination. le docteur conseille à ses parents d'emménager sur la côte dans une maison plus saine. Avec des amis et son « cousin de fêtes et d'infortune », ils lisent et vivent Robinson Crusoë dans les ruines d'un château, brûlant du feu de leurs histoires. Lewis apprend ainsi qu'au fond même du plus avili des êtres humains, quelque chose brûle, une passion, un feu, qui le rend poétique. Quand il fait la tournée des phares avec son père, un ingénieur qui comme son père avant lui en construit et lui prépare un avenir tout tracé, il lui avoue qu'il préfère inventer plutôt que d'écrire un essai historique. Il sait très vite qu'écrire, ce n'est pas de la belle analyse ni de la description, c'est donner de la chair, et c'est ça qui fait l'oeuvre d'art.
La chair, il éprouve ce qu'elle est dans des bordels ; il renonce aux études d'ingénieur qui l'ennuient et à la religion de ses parents. Il se veut athée. Il quitte le domicile parental, séjourne sur la Côte d'Azur, puis dans la région de la Loire, retrouve son cousin à Barbizon, voyage dans les Cévennes avec l'ânesse Modestine pour trouver le courage de rejoindre Fanny, rappelée par son mari, aux Etats-Unis.
Il embarque, se retrouve à Monterey, malade, vérolé, mais rencontre Jules Simonneau, un ami de Fanny. Parti dans le désert sans eau, il est sauvé par des trappeurs qui l'emmènent chez une guérisseuse Indienne. Fanny le rejoint. Elle écrit aux parents de Louis pour qu'ils l'aident financièrement. Tous deux vivent une vie aventureuse dans la mine de Silverado, en Californie.
Quand son père, dont il n'a pas su voir la véritable nature, meurt, il veut s'éloigner de l'Ecosse, et s'installe aux îles Samoa, où le couple se conforme aux moeurs du pays, où les habitants l'appellent le raconteur d'histoires.
Un homme noir, au visage invisible, porteur de lunettes -son double ?- le suit depuis qu'il est petit, et lui annonce sa mort. C'est lui qui le pousse à écrire. Stevenson dit que ce sont ses brownies, les petites créatures monstrueuses, qui en fait inventent les histoires tirées de ses monstrueuses intériorités à lui.
C'est une BD très intéressante à lire, bien conçue, qui fait voyager aussi par ses dessins. Des brumes écossaises, de la lande côtière, à la lumineuse côte d'Azur, aux Cévennes plutôt nocturnes, du désert aride à la compagnie des crotales, du phare de Point Pinos en Californie, où le puissant Pacifique souffle ses mystères infinis au clair paradis, où tout tabou tombe, de l'île Samoa. Les lanternes et réverbères sont omniprésents. Les réverbères éteints laissent le champ libre aux brownies, et les lanternes à l'odeur nauséabonde, si elles sont piteuses de l'extérieur, contiennent une féconde chaleur à l'intérieur d'elles-mêmes, tout comme Stevenson.
Combien de fois ai-je lu L'Ile au trésor. Je pense maintenant connaître bien son auteur et sa conception des histoires qui doivent tenir compte des questions des lecteurs et leur fournir des réponses limpides.
Les commentaires de la fin de l'album m'ont appris la disparition de Michel le Bris, spécialiste de l'oeuvre de Stevenson, le 30 janvier 2011, à l'âge de 76 ans des suites d'une longue maladie. Cet écrivain, né de père inconnu, fondateur d'Etonnants Voyageurs , prône une littérature-monde et milite pour que l'imagination soit au pouvoir.
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