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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Ecoutez-moi jusqu'à la fin est le premier roman de Tess Gunty, une femme de lettres d'à peine trente ans, qui n'avait jusqu'alors écrit que des chroniques poétiques et philosophiques. Ce coup d'essai semble être un coup de maître. L'ouvrage est considéré comme le livre de l'année aux Etats-Unis, où il a obtenu le National Book Award, un prix prestigieux outre-Atlantique. Les critiques sont dithyrambiques, on évoque un talent exceptionnel.

Hélas ! Il peut arriver que le génie me passe au-dessus de la tête. Il ne faut alors pas me tenir rigueur de ne pas être à la hauteur et de rester dubitatif.

Les événements — ne parlons pas d'intrigues, il n'y en a pas ! — se déroulent au Midwest américain, dans la ville fictive de Vacca Vale, une ancienne cité industrielle, où les usines, jadis prospères, ont depuis longtemps mis la clé sous la porte, abandonnant sur place chômage, désespérance, alcoolisme, ainsi que des dégénérescences provoquées par des pollutions. La plupart des personnages habitent un immeuble de logements sociaux mal fichus, le Clapier. Ces gens sont tous des laissés-pour-compte du mythique rêve américain (dans ses différentes déclinaisons).

Parmi eux, une jeune femme de dix-huit ans au physique insignifiant exerce une sorte de fascination sur les autres. Elle semble vouloir s'opposer à la trajectoire consumériste, capitaliste et écocidaire de l'Amérique, en s'inspirant des enseignements d'une nonne mystique et savante du douzième siècle, qui déclarait recevoir en direct la parole de Dieu. Après une déception sentimentale cruelle, la jeune femme a choisi de se faire appeler Blandine, en référence à l'esclave romaine jetée aux lions dans les premiers temps du christianisme et sanctifiée en récompense de sa Foi… Lacérée par des bêtes ! Pourrait-elle avoir la même destinée ? En tout cas, un soir, « Blandine sort de son corps »…

Il y a d'autres personnages. La veille, à Los Angeles, une femme âgée était décédée. Elle avait été la star enfantine d'une série TV à succès des années cinquante. Elle avait ensuite mené une vie de bâton de chaise, puis s'était investie dans une cause animalière, tout en assumant avoir été incapable de s'occuper d'un fils non désiré. Un stéréotype hollywoodien, qui entre parenthèses, ressemble à la vie d'une ancienne grande star française. le fils en question tient un blog sur la santé mentale. C'est un original qui aime se grimer en épouvantail luisant. Les circonstances lui permettront de rayonner.

Tout cela n'a vraiment ni queue ni tête, mais il fallait une imagination débordante, un vrai talent d'écriture et un peu d'humour pour en faire un texte de cinq cents pages, que nonobstant quelques longueurs, j'ai lu sans déplaisir, tout en essayant de comprendre où son autrice voulait m'emmener. Au travers de différents symboles, on peut en effet y voir la critique acerbe d'une société américaine et plus généralement occidentale, fondée sur des rapports de domination — patriarcale, raciale, financière, la rengaine est connue — mais on croit aussi y déceler la caricature volontaire d'une telle critique. L'une et l'autre se vaut ou se valent, pourrait-on dire.

Le titre sous lequel le livre est publié mérite un commentaire. Alors que l'original est The Rabbit Hutch (in french : le Clapier), l'éditeur a choisi pour la version française : Ecoutez-moi jusqu'à la fin. Qu'en a pensé Tess Gunty ? Il est vrai que l'annonce mystérieuse dans les premières lignes que « Blandine sort de son corps » incite à lire le livre jusqu'à la dernière page dans l'espoir d'un éclaircissement.

Je m'incline devant le choix de l'éditeur, mais à mon sens, « Le Clapier » aurait été un titre vraiment pertinent. J'ai bien aimé l'histoire aberrante de cet immeuble imaginé par l'autrice. Elle me rappelle celle, non moins aberrante, d'un authentique immeuble de logements sociaux, en France, dans une ville ayant subi une déqualification analogue à celle de Vacca Vale. Cet immeuble grotesque porte le nom — ni inspiré ni inspirant — de « Unité d'Habitation de Firminy-Vert ». J'y avais situé une partie de mon roman Les moyens de son ambition.


Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Entre absurde et tragique, ce premier roman s'éparpille, mettant en scène les différents habitants d'un immeuble, le Clapier. Les focalisations s'alternent, les histoires individuelles s'imbriquent ou se font écho de loin tandis que Tess Gunty tâche de se saisir de l'essence de notre humanité. Les sujets abordés sont multiples et ce foisonnement tend donc à diluer les messages de ce livre (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/03/14/ecoutez-moi-jusqua-la-fin-tess-gunty/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Dans une petit ville désindustrialisée d'Indiana, l'autrice nous fait suivre quelques habitants du « clapier », une sorte de HLM.
Le personnage principal s'appelle Blandine (elle s'appelait avant Tiffany mais a changé de prénom pour prendre celui d'un sainte dévorée par les lions)
L'écriture est originale. On sait dès les premières pages qu'il va arriver quelque chose de terrible à Blandine, qu'il y aura des cris et un couteau et que Blandine « sortira de son corps ».
Il faudra un peu plus de 500 pages (parfois un peu trop fouillis pour que l'on comprenne). La fin est très surprenante et vaut le détour. Malgré des longueurs et quelques personnages qui semblent sortis d'un autre livre, je suis contente de ma découverte du premier roman de cette autrice.
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Voici une chronique qui arrive un peu plus tôt que prévu, du fait que je rencontre Tess Gunty ce vendredi. Il s'agit du premier roman de cette autrice. de plus, il a gagné le National Book Award.

C'est assez compliqué pour moi de vous parler de ce roman, une fois ma lecture terminée, je ne savais pas trop quoi en penser. Il y a beaucoup de chose dans ce livre, cela a même été par moment pour moi un peu trop. Je n'ai pas toujours bien compris où voulait m'emmener l'autrice.

J'ai beaucoup apprécié Blandine, c'est typiquement le genre de personnage auquel je m'accroche, sauvage, énigmatique et solitaire. Sa vie est un chaos d'évènements qui se sont enchaînés les uns après les autres. Elle est mystique et attire forcément le regard. Dès les premières pages on nous dit qu'elle va sortir de son corps. Nous allons donc avancer dans notre lecture en mode aveugle avec un compte à rebours qui va nous entraîner jusqu'à ce moment. Mais aucunes lignes droites, Tess Gunty ne va pas droit au but, elle nous entraîne dans un méli mélo d'histoires qui s'entrecroisent, et c'est à nous lecteur de démêler cette bobine de fil.

Je me rend compte en écrivant ma chronique que ce qui m'a dérangé lors de ma lecture, cette sorte de chaos, est en réalité la grande force de ce roman. Et c'est là que Tess Gunty est prodigieuse. Elle construit une histoire sur le chaos d'une vie, celle de Blandine, mais aussi sur les vies chaotiques des autres personnages en y ajoutant le chaos ambiant de Vacca Vale. Mais également chaos religieux, social et politique. C'est vraiment impressionnant en fin de compte.

Mais parmi tout ce chaos, il y a deux personnages dont je ne comprend toujours pas l'utilité, l'actrice qui est décédée et qui écrit sa propre nécrologie ainsi que son fils… de mon point de vue ils n'apportent absolument rien à l'histoire, hormis peut-être une petite bouffée d'oxygène. Je poserais la question à l'autrice d'ailleurs.

Voilà donc une lecture qui me laisse assez dubitatif. Je reconnais la puissance de ce roman, l'intelligence de Tess Gunty mais je suis resté un peu sur le côté. Pour moi, il y a peut-être un peu trop de chaos.
Lien : https://readlookhear.blog/20..
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Ce premier roman est un véritable mélange des genres : à la fois roman d'apprentissage et roman éco-féministe, l'action se situe dans un environnement apocalyptique, post industriel d'une ville fictive de l'Indiana où les lapins prolifèrent et dont le nombre surpasse celui des habitants. Au coeur d'un Midwest à la dérive « […] l'odeur de boyaux de poisson, cadeau de l'usine de nourriture pour chien qui se trouve de l'autre côté de la route » qui se rêve nouvel eldorado façon Silicon Valley, une fois que les ruines des usines Zorn Automobiles auront été transformées en loft instagrammables.

Beaucoup de sujets sont abordés (trop ?) : économique, écologique, religieux, féministe, social, …Tout cela s'articule autour du personnage de Blandine Watkins, jeune femme de 18 ans, à la fois brillante et singulière, un brin mystique, un poil déjantée mais plutôt clairvoyante. Fascinée par les textes d'Hildegarde von Bingen, elle s'y réfère constamment, trouvant dans ces textes un refuge, une référence dans ce monde où tout part à vau l'eau.
Blandine, tout comme ses trois colocataires, Jack, Malik et Todd, vient d'une famille d'accueil. Elle a récemment quitté l'école, travaille dans un diner créé par un « duo de Hipsters optimistes qui attire un nombre disproportionné de gens coiffés de bérets ». Ils habitent « le Clapier », un ensemble de logement sociaux. Tout le monde s'entend, s'observe … et s'ignore.

Les personnages secondaires sont aussi cocasses que Blandine : Joan Kowalski, une femme timide qui travaille comme modératrice de commentaires sur un site de nécrologie en ligne, Hope, jeune maman effrayée par le regard de son bébé ou encore Moses, fils d'une super star de la télé, qui enduit son corps de liquide fluorescent avant d'entrer par effraction chez les personnes qui lui ont déplu juste pour les effrayer.

Les thèmes sont multiples, les personnages nombreux, les styles et les formes varient aussi. On passe alternativement d'un récit à la première puis à la troisième personne, à des extraits de textes de la mystique Hildegarde von Bingen, des commentaires d'un livre d'or d'une défunte qui a elle-même écrit sa nécrologie, ou encore un chapitre avec les dessins (parfois effrayants de Todd / Nick, son meilleur ami dans la vraie vie).

C'est maitrisé, efficace, on s'amuse à l'évocation des « bâtiments en parpaings peints de la couleur des requins, ou de la femme vêtue d'une robe jaune-bébé », on rit jaune aussi devant l'état de cette ville qui rappelle une cruelle réalité, mais une semaine après avoir refermé ce premier roman, je garde le sentiment d'être passée à côté. Trop de sujets, de chaos, de personnages …
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J'avoue que le titre m'a fait sourire au début car j'ai résisté au texte. La figure spectrale de Blandine/ Tiffany ainsi que la narration intelligente mais froide m'ont tenues à distance. Qu'est-ce qui m'a permis d'aller jusqu'au bout ? L'intelligence justement. le roman est animé d'une présence supérieure semble vouloir donner des clés pour voir au-delà de la chose terrestre. Des images se répondent implicitement : le clapier / les hommes enfermés dans leur catégories sociale, le vide intérieur ressenti par Tiffany / la vacuité de la vie à Vacca Vale., etc. La scène inaugurale est aussi très réussie. L'autrice est également poète et le jeu sur la rythmique et les sons est saisissant. Mais la construction narrative présente quelques longueurs. Ce roman laissera peu de traces dans mon année de lecture malgré toutes ses qualités.

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