Chats paresseux qui lézardent sous les voitures sales en contemplant la parade des chaussures italiennes, des ongles vernis, des revers de talons multicolores et déchirés, des talons aiguilles, des tongs en plastique, des pieds nus qui trépignent et des chevilles, délicieuses chevilles nues dont viendraient s’emparer de grosses mains pour les relâcher aussitôt et mieux les reprendre un peu plus haut, remontant ainsi jusqu’à la source chaude qui, doucement, généreusement, se fait légère inondation fleurant l’anguille, le poisson rouge et l’eau de rose
Le vent me gardait éveillé. Je roulais aussi vite que lui. Encore plus vite que lui. Je fuyais l'espace et le temps, comme s'il s'agissait de balles. La mort ne vient pas quand on lui fait face ; elle est pleine de traîtrise, c'est une lâche qui ne s'intéresse qu'aux faibles et qui frappe les aveugles.
Je marchais, et les bougies dansaient dans la ville aux murs blessés, la ville privée de lumière, la ville brisée, enrobée de plastique, plâtrée d'impacts de balles.
Je sautais beaucoup de détails le concernant et, quand j’ai vu comme elle était contente, je me suis mis à changer les noms, j’ai planté des arbres, j’ai peint de couleurs tropicales les immeubles de béton de notre vieux quartier, j’ai fait danser et chanter les gens, même sous la pluie de bombes.
J’ai longé le corridor. Plusieurs autres cellules y donnaient de part et d’autre. J’avais partagé le sol raboteux, les murs humides et froids avec d’autres malheureux qui gémissaient comme des dauphins échoués, nageant les yeux ouverts dans le même océan, observant la lente remontée des bancs de bulles violettes.