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Critique de Krissie78


D'entrée de jeu le titre intrique. Qui sont ce chat, ce général et cette corneille ? L'histoire se noue autour d'un drame survenu en 1994 lors de la première guerre de Tchétchénie, un épisode comme la guerre en produit tant, impliquant cette fois-ci quelques soldats de l'armée russe et une jeune tchétchène.

Dès les premiers chapitres l'auteure tisse la toile des secrets de ses personnages, avant de faire faire un bond dans le temps pour nous propulser en 2016. Nous y faisons la connaissance de Chat, une jeune comédienne géorgienne exilée à Berlin qui va se voir proposer d'interpréter un rôle unique et déroutant ; du Général, un millionnaire russe, homme de pouvoir mystérieux et redouté qui a des comptes à solder avec son passé ; et de la Corneille, un journaliste de guerre désabusé et à la dérive, qui se nourrit du malheur et de la guerre, oiseau messager qui annonce l'arrivée du malheur et qui se voit offrir la possibilité d'écrire enfin le livre sur lequel il a déjà tant travaillé mais qu'il avait dû mettre en veille suite à un drame personnel. Deux femmes, toutes deux disparues, vont faire le lien entre ces trois personnages principaux.

Autour de cette histoire de vengeance c'est aussi le portrait de nations à un tournant de leur histoire : la Russie d'après la pérestroïka, en quête de restauration de son image de la "Grande Russie", les républiques de l'Est d'après l'URSS, l'arrivée d'une forme de capitalisme, les désillusions succédant à ces changements initiés avec la chute du mur de Berlin.

La plume de Nino Haratischwili est dense, captivante parfois poétique. Dense car les longs chapitres comportant peu de dialogues sont des récits fourmillant de descriptions et de détails situant chacun dans son environnement géopolitique, social et culturel et sa psychologie. L'intrique est éminemment psychologique, l'auteure faisant beaucoup de place aux états d'âme des personnages. Elle ne se limite pas au Chat, au Général et à la Corneille mais englobe une multitude de personnages secondaires.

Dans ce récit choral très maitrisé et centré sur la comédienne, le journaliste et le millionnaire, l'auteure fait preuve d'une grande maîtrise de son sujet. Tout au long de ce récit sinueux qui multiplie les voyages dans le temps, distillant au compte-gouttes les indices, Nina Haratischwili réussit à ne jamais nous perdre dans son labyrinthe. Elle fait preuve d'un sens aigu du suspense et construit un roman à la progression dramaturgique efficace. Un regret : des longueurs dans l'installation de l'intrigue et l'introduction des personnages. Il n'est pas certain que le lecteur ait besoin d'autant de détails sur chacun pour suivre et comprendre la trajectoire et le point où l'auteure veut nous mener.

Il n'en demeure pas moins que « le Chat, le Général et la Corneille » est un très bon roman, à l'écriture riche et dense qui me fait penser à la littérature russe classique.

Merci aux Editions Belfond et à Babelio pour leur confiance et pour cette rencontre littéraire et pour la découverte de cette auteure géorgienne installée en Allemagne et qui écrit désormais en allemand.
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