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Critique de Elamia


Plutôt agréablement surprise par ce roman, qui loin d'être un coup de coeur, reste distrayant et original de par son thème et sa narration.

Robert Harris nous invite à revivre les deux derniers jours de la tristement célèbre ville de Pompéi à travers les yeux d'un seul personnage. Il s'agit d'Attilius, jeune ingénieur chargé de veiller sur l'approvisionnement en eau et sur l'aqueduc. Il a hérité du statut d'aquarius par sa famille -plus particulièrement du grand Agrippa - et c'est un rang qui sied parfaitement à son esprit intègre et avisé. Mais voilà qu'une succession de signes annonciateurs et de problèmes s'amoncellent et compliquent sa tâche. Plusieurs villes sont privées d'eau, et à certains endroits elle est même empoisonnée par le souffre. Commence alors pour le jeune homme une investigation au cours de laquelle, il va s'employer à trouver l'origine du problème. Parallèlement, il tentera de percer à jour la disparition d'Exomnius, son prédécesseur, mystérieusement volatilisé dans la nature. Attilius va à la fois, tenter de gagner le respect de dignitaires romains hauts placés et pas toujours conciliants, et régulariser au plus vite cette pénurie d'eau qui commence déjà à créer de fortes tensions. Nous voilà donc d'entrée de jeu, propulsés au coeur même de la Rome antique, dans un décor criant de réalisme et un climat empli de troubles. Si j'avais une vague idée des moeurs de l'époque, Robert Harris me conforte dans l'idée que ce n'est définitivement pas une époque à laquelle j'aurais aimé vivre. Pourtant, et comme beaucoup je pense, c'est la curiosité qui m'a poussée vers cet ouvrage, dans l'espoir d'en savoir un peu plus sur cette fameuse tragédie, qui angoisse, impressionne et surtout fascine.

Tout l'intérêt du récit, réside non pas dans sa finalité, que tout le monde connaît déjà, mais dans l'exploration et la chasse aux indices d'Attilius. C'est intéressant et captivant de voir comment il va se débrouiller pour gagner à la fois le respect des hommes qu'il dirige mais aussi et surtout de savoir si sa réparation aura gain de cause. Et bien sûr s'il parviendra à s'enfuir avant que l'inévitable se produise...

Même si l'aspect très théorique et cartésien est assez développé -notamment sur les techniques de gestion de l'eau- à ma grande surprise, les pages avaient plutôt tendance à défiler toutes seules.
C'est donc une histoire relativement prenante, qui n'a rien d'exceptionnel, avouons-le, mais Robert Harris a un certain talent pour intéresser et intriguer son lecteur. Il a fait le choix très judicieux de découper son récit en quatre grandes parties, qui coïncident respectivement avec l'avant-veille, la veille et le jour même de l'éruption. La tension monte progressivement, avec le palpitant décompte des heures chapitre par chapitre, et le franchissement graduel des paliers de l'éruption. Je ne parlerai pas de la véracité historique dans les dates, ou dans les évènements relatés, mais il est clair, que l'auteur a fait de sérieuses recherches. le récit est très détaillé que ce soit en matière de techniques de gestion de l'eau, de secousses sismiques ou encore sur les rudiments de la navigation. Chaque début de chapitre renvoie à un extrait de texte scientifique, qui interpellera moyennement les plus littéraires d'entre nous, mais qui prouve que l'auteur s'est honnêtement documenté sur le sujet. On ne peut que saluer sa volonté de faire corréler signes avants-coureurs et preuves scientifiques. Il intègre harmonieusement véracité historique et éléments imaginaires, le tout dans un aspect romancé qui fait de ce livre une bonne entrée en la matière. de même que les personnages inventés côtoient des figures historiques très connues, il n'est pas nécessaire d'être un fin connaisseur de l'antiquité pour reconnaître certains noms qui ont marqué L Histoire. Ce roman m'a vraiment donné envie de renouer avec l'antiquité, que j'avais très brièvement étudiée en cours de latin. Suite à cette lecture, j'ai envie de continuer sur ma lancée et de chercher des ouvrages pour approfondir ce sujet passionnant.

La grande part de réussite de ce roman, tient sans conteste, dans le choix des personnages. L'auteur nous propose une figure principale qui a le net avantage de s'apparenter au commun des mortels. Attilius est un homme profondément marqué par un drame familial, c'est un des seuls à rester honnête dans ce milieu largement corrompu et cerise sur le gâteau, il ne croit ni en la religion ni à la philosophie. En effet, il se gausse assez facilement des coutumes de ses contemporains, qu'il juge grotesques et parfois trop cruelles. Ce qui fait de lui un personnage atemporel auquel tout lecteur peut s'apparenter facilement. Il suscite donc d'emblée la sympathie à la fois par son caractère authentique, sa façon de penser, mais aussi sa manière de s'opposer aux dirigeants. Ces derniers, nombreux au tableau sont tous dépeint comme cupides, corrompus, malveillants, mais plus ils sont décriés, plus Atillius apparaît donc comme un modèle de bonté. Mais il n'est pas le seul, puisque, étonnamment, le charismatique Pline, est dépeint en véritable héros courageux, qui n'hésite pas à aller au devant de sa propre mort. Une fois encore, si comme tout le monde, je connaissais la réputation de cet homme, désormais j'ai envie de m'intéresser de plus près à ses écrits. Après tout, si ce qui est dit dans le roman a un soupçon de vérité, c'est un homme qui semblait apprécier la nature et la respecter, et il est possible que je me découvre des atomes crochus avec sa pensée.

Pour accentuer le côté larmoyant de l'instant, l'écrivain inclut inévitablement de l'amour dans son récit. Attilius, déjà fort occupé, aura donc la chance de tomber sur la séduisante Corelia, tout aussi affable que lui, qui se trouve aussi être la fille de son pire ennemi, Antilius. Cela rajoute sans conteste une grosse part de suspens mais pas d'inquiétude, le tout reste très vertueux et apporte même une fin ouverte que j'ai vraiment appréciée. Je remercie donc l'auteur pour ce côté un peu fantaisiste, qui permet sans doute de toucher un public plus large, sans toutefois tomber dans l'exagération. A travers son héros, et ses choix narratifs, Robert Harris frôle de très près la légende, et clôt son ouvrage sur une note très poétique, voire épique.
Pompéi est donc un cocktail détonnant qui mêle histoire, stupéfaction, enquête et amour, le tout dans une course contre la montre qui ne cesse d'aller crescendo.

En conclusion, je dirais que c'est une lecture plaisante, très palpitante, qui permet de passer un bon moment. S'ajoute à la distraction, le côté instructif puisque les rappels sur la civilisation romaine agrémentent de façon ludique notre culture générale. A mon sens, Robert Harris a pleinement réussi son objectif en faisant de nous les spectateurs impuissants d'un des plus grands drames de l'Histoire.


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