AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de berni_29


J'aime les quelques livres que j'ai lus de Jim Harrison. Certes il adorait chasser et je reconnais que c'est une des choses qui m'éloigne de lui. Mais pour le reste, je suis prêt à tout partager, la cuisine, le vin, l'amour, les rivières, les grands espaces, la passion des chevaux, l'ivresse, et puis après l'ivresse ou peut-être encore pendant cet instant fragile ou tout vacille, où nous venons de refaire le monde éternellement, revenir sur nos pas et se tromper de porte, revenir dans la part de nos vies intimes que nous ignorions. Je vais vous parler de Dalva, ce roman, ou bien cette personne, les deux semblent se lier entre eux.
C'est Dalva, la narratrice, qui nous raconte cette histoire, une histoire ancienne, elle est l'arrière-petite-fille d'un pasteur missionnaire auprès des Sioux. Son grand père était pour moitié indien Lakota. Elle n'est pas âgée, pas encore l'âge de se pencher sur son passé, elle n'a que quarante-cinq ans, mais des circonstances familiales l'amènent à se pencher sur son passé.
L'histoire de la famille de Dalva est marquée par des deuils et des séparations. Michaël est historien. Il a été l'amant de Dalva, il en est encore amoureux. Il s'intéresse de près à l'histoire de la famille de Dalva, il s'intéresse aussi de très près à Dalva avouons-le, il cherche à la convaincre de fouiller son passé. Sous les pressions de Michaël, elle accepte finalement. Michaël réussit à la convaincre d'avoir accès aux archives familiales, notamment aux journaux de son arrière-grand-père.
Le roman se partage alors entre les récits de Dalva, ceux de Michaël et les extraits du journal de l'arrière-grand-père. Jim Harrison nous entraîne dans l'histoire américaine et celle des ancêtres de Dalva, en voyageant dans l'espace et le temps. Jim Harrison, merveilleux conteur, sait alterner le souffle d'une épopée et les anecdotes qui viennent comme des braises dans le feu qu'on pose le soir au bord du bivouac. Nous voyageons de flash-back en ellipses, nous sommes Dalva dans son voyage intérieur et magnifique. C'est un très beau roman familial, une rivière qui coule de son passé, nous nous penchons sur la rive pour en prendre des lampées avec joie.
Et surtout ne baissez pas les bras devant ce texte ample et vertigineux comme les grands espaces dont on devine à peine l'horizon.
À présent je veux vous raconter ici une anecdote personnelle. Il y a quelques années, je fêtais le nouvel an avec des amis dans un chalet perdu dans les hauteurs du Cantal. Nous étions très nombreux, je ne connaissais pas tout le monde, lorsque tout d'un coup j'entends crier : « Dalva ! Dalva ! ». Mon cœur de lecteur s'est mis à battre. Je n'étais qu'à mon deuxième verre... Une femme, sur la terrasse où nous regardions la neige tomber, a saisi alors dans ses bras sa toute petite fille qui s'enfuyait vers la nuit. Dalva ? Jim Harrison ? Et nous avons alors discuté et passé un bon moment à parler d'un auteur que nous admirions en commun. Elle m'a alors avoué deux secrets, mais dont je me suis aperçu plus tard qu'elle partageait avec tout le monde : amoureuse folle des écrits de Jim Harrison, elle avait décidé d'appeler sa première fille Dalva. Bon ! Et, lors d'une visite au festival des Étonnants Voyageurs de Saint-Malo, elle avait rencontré son auteur fétiche et lui avait avoué dans un anglais approximatif l'existence d'une autre Dalva, sa Dalva ! pensant le fasciner. L'auteur avait les yeux qui brillaient, m'avait-elle dit... Dans le ciel enneigé du Cantal, je voyais danser les étoiles du Dakota... Au bout de quelques verres, le compagnon de la femme vint rompre le charme et me glissa dans l'oreille que plusieurs Dalva étaient nées dans la foulée du roman sur cette merveilleuse Terre faite de rivières, de grands espaces et d'océans d'amour... C'était Jim Harrison dixit qui lui avait glissé cette confidence, les yeux brillants de whisky.
Dalva, c'est aussi l'histoire d'une femme moderne, chez les cow-boys et les indiens. Dis comme cela, cela paraît un peu simpliste, mais tout de même, rendons grâce à Jim Harrison d'avoir écrit un magnifique personnage féminin qui n'a, non seulement pas pris une ride presque trente ans plus tard, mais sous la présidence d'un personnage de la reality-show ubuesque, voilà le visage d'une autre Amérique telle qu'on l'aime encore, différente, dissonante, dissidente, belle quoi !...
Commenter  J’apprécie          8416



Ont apprécié cette critique (74)voir plus




{* *}