Bâtie sur une éminence, la maison de l'agha regardait descendre un jardin dont la dernière terrasse touchait à la route. C'était un véritable boustâne persan, un verger du Cantique des Cantiques, où les arbres fruitiers poussaient parmi les légumes et les fleurs. A ce moment du printemps c'était une grande féerie. Tout le long des entiers, des iris tendaient leurs petites tasses d'améthyste hors des gobelets de jade. Contre l'enceinte en pierres sèches, les buissons de roses flambaient comme une seconde enceinte de feu, les artichauts balançaient leurs houppes bleues sous le feuillage gris des oliviers, les vignes grimpaient autour des figuiers et tressaient des tonnelles d'amour, comme celles où "les filles de Jérusalem attendaient le bien-aimé".