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Citations sur Whyborne & Griffon, tome 6 : Engelure (7)

Ival attrapa mon menton et fit pivoter ma tête, me forçant à le regarder.

— Quant à la stèle, il y a une explication parfaitement raisonnable. Les fragments ont été découverts en 1882. Tu aurais eu à l’époque, quoi, treize ans ? Tu as probablement vu un article dans un journal, que tu as depuis oublié.

L’explication était si sensée que j’eus honte de ne pas y avoir pensé moi-même.

— Tu as probablement raison.

— Bien sûr que j’ai raison. Quant aux rêves, je suis certain qu’il ne s’agit que de vilains tours que ton esprit te joue. Ils sont étranges mais n’ont rien d’aberrant.

Il me caressa délicatement la mâchoire de son pouce.

— Tu as subi quantité d’événements difficiles, et les découvertes de ton frère n’ont fait qu’empirer les choses. Mais tout ira bien. Tu es un homme bon, Griffon Flaherty, et je n’ai pas de mots pour te dire combien je t’aime.

Je le serrai fermement.

— Je t’aime aussi, Ival.

J’espérais qu’il avait raison.
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Je me glissai hors des couvertures et escaladai maladroitement le géant à ma droite.

— Désolé, désolé, murmurai-je en espérant qu’il ne se fasse pas de mauvaise idée lorsque ma main tomba là où il ne fallait pas.

Je préférais garder toutes mes dents. Par chance, il se contenta de ronfler davantage, toujours plongé dans le sommeil, et de rouler sur le côté. Enfin libre, je trouvai mes bottes en peau de phoque, mes moufles en cuir d’orignal, et ma parka en sergé parmi l’amas de vêtements.

Je ne savais pas en revanche où je comptais aller. Peut-être pourrais-je prendre un verre au saloon en bas et prétendre m’assoupir à cause de l’alcool. M’y laisseraient-ils « cuver » sans m’importuner, sachant que j’avais déjà payé un lit ? Ou peut-être l’une des prostituées me laisserait-elle dormir dans sa tente si je lui payais son tarif habituel ? Faisaient-elles payer à l’heure ou à la séance ?

Je m’imaginai alors quelqu’un me surprendre alors que je sortirais de la tente d’une fille de joie et j’en eus l’estomac retourné. Peut-être ne valait-il mieux pas.
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— Vous voulez fendre la montagne et en relâcher le grand vers, gronda-t-il d’une voix basse et menaçante.

Parbleu. Cet homme était-il saoul ? Je fis un rapide pas en arrière en levant les mains.

— Je vous assure que je n’ai pas l’intention de fendre quoi que ce soit.

Il ne me crut pas, à l’évidence, car il leva son bras. Une longue dague refléta la lueur de la lune.

Je poussai un cri de surprise et m’écartai précipitamment. Mon pied s’accrocha dans une ornière, et je chus, mon coccyx percutant douloureusement la boue gelée qui avait la consistance du béton. Il bondit sur moi, sa lame frappant de haut en bas, et je criai le nom secret du feu.
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Nous avions l’un comme l’autre attendu trop longtemps pour vouloir faire durer cela. Nous nous frottâmes l’un contre l’autre, nous embrassant et nous caressant, nous abreuvant de nos désirs, de nos goûts et de nos odeurs. Ses doigts glissèrent dans mes cheveux, les agrippant doucement. Il m’embrassa avec force. J’entrouvris les lèvres, le laissant investir ma bouche avec sa langue, alors que ses coups de reins frottaient son membre contre mon ventre. Il n’était que chaleur, passion et peau marquée par la magie, mon amant, mon époux, et le monde rétrécit jusqu’à ne plus contenir que le lit dans lequel nous étions. Toutes mes inquiétudes et mes chagrins, ma crainte que Jack découvre qui nous étions, que l’umbra s’avère trop puissante pour être vaincue, tout disparut. Il n’existait plus que cet instant et nous deux.

Je ravalai un cri lorsque je me déversai, nos échanges soudain trop intenses. Il renforça sa poigne sur mes cheveux, m’obligeant à le regarder alors que je me répandais entre nous. L’intimité de son geste me procura une dernière petite secousse de plaisir. Ses lèvres, enflées après tant de baisers, s’ouvrirent, et l’espace d’un instant je crus qu’il allait parler. Toutefois, il me tira vers lui, ses dents se refermant sur mon épaule pour étouffer son cri alors qu’il s’abandonnait à son propre orgasme.
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— C’est une ville, souffla Christine. La vois-tu, Whyborne ? Une cité !

Le monument de pierre verte faisait deux bons mètres et demi de haut, et près de la moitié en largeur. D’épaisses bandes de gravures marquaient le sommet et le bas de l’œuvre des deux côtés. Certaines d’entre elles constituaient des figures géométriques, répétées à intervalles irréguliers, là où d’autres étaient composées d’étranges groupements de points et de volutes. Entre les bandes de la face sud était gravé un bas-relief aux détails incroyables, représentant des montagnes... et une ville.

Les Tessons d’Eltdown dataient d’avant toute colonisation humaine connue des îles Britanniques, et cette stèle, enfouie sous trois mètres cinquante de boue et de graviers, devait assurément être très ancienne. En supposant qu’elle fût contemporaine aux Tessons d’Eltdown, elle devait précéder de beaucoup l’agriculture, et par conséquent, le concept même de ville.
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Griffon ne comprenait pas à quel point cette découverte était extraordinaire, ce qu’elle signifiait pour l’histoire humaine. Dès lors, tout serait différent. Tous les livres sur l’avènement de la civilisation devraient être réécrits, notre compréhension même de notre espèce pourrait changer.

Quels secrets détenaient ces êtres anciens ? Quelle sorcellerie ? Que pouvais-je... Que pouvions-nous apprendre d’eux ?

Les rayons de la lanterne tremblaient de manière erratique, à cause de nos mains fébriles. Nous ne pouvions faire demi-tour, pas si tôt. Nous devions voir de nous-mêmes si nos rêves les plus fous étaient bien réels.

Et si l’umbra s’y trouvait, si elle appelait Griffon de quelque façon, nous prendrions simplement soin de ne pas endommager toute chose qui pouvait s’avérer être un sceau magique. Rien de plus simple.
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— Je suis désolé que vous ayez été mêlé à cette affaire, Révérend.

Scarrow observa les alentours avec inquiétude.

— Je... J’ignore ce qu’il se passe exactement, dit-il d’une voix tremblante. Mais écoutez-moi, je vous en conjure. La violence ne résout jamais rien.

— La violence résout toutes sortes de problèmes, le corrigea Turner. Elle a permis au Blanc d’acquérir ce continent. Elle a permis à l’Angleterre de régner sur les mers. Elle a fait rentrer dans le rang les états du Sud, et elle remplit les coffres des hommes riches au point qu’ils puissent engager des armées de Pinkertons pour rompre les grèves. Si je me souviens bien de mes leçons d’histoire, la majorité de l’Europe a été convertie à votre religion à la pointe de l’épée, ai-je tort ? La violence résout donc un grand nombre de problèmes, si je puis me permettre.
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