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Critique de Maghily


Vous recherchez un roman qui vous permette de comprendre comment un Donald Trump a pu devenir président des USA ?! Avec Les Fantômes du vieux pays, Nathan Hill nous donne un semblant de réponse… Et cela ne me rassure pas spécialement pour les prochaines années…

Dans ce roman, nous suivons principalement trois grandes trames narratives : deux se déroulant au présent et la dernière, qui concerne Faye, qui démarre lors de son adolescence et remonte le temps jusqu'au présent. La trame principale concerne Samuel : nous le découvrons quelques jours avant l'appel de l'avocat, alors qu'il tente de se dépatouiller d'un conflit avec une étudiante qu'il accuse de tricherie. Il est dépeint comme un quarantenaire blasé qui, malgré son poste universitaire semble avoir raté sa vie : il déteste enseigner, n'arrive pas à rédiger la moindre page du roman qu'il doit écrire depuis 10 ans, s'est endetté pour acheter une maison qui a perdu une grande partie de sa valeur et passe la plupart de ses soirées à jouer en ligne, dans une univers parallèle appelé Elfscape.

De temps en temps, cette trame est interrompue par des chapitres qui concernent un certain Pwnage, dont on découvre qu'il est un partenaire de jeu de Samuel. Avec Pwnage, Nathan Hill nous met en garde contre les dangers de l'addiction au jeu vidéo. Ce personnage, qui a connu de lourds problèmes dans sa vie personnelle et professionnelle, s'est totalement désociabilisé et ne vit plus qu'à travers ses doubles virtuels. Ce qui a évidemment de nombreuses répercussions sur sa santé mentale et physique. Il est aussi le reflet d'une population dont le niveau de vie a beaucoup baissé ces dernières années et pour laquelle le rêve américain est bien loin…

L'auteur aime jouer avec les modes de narration, pour que notre expérience de lecture se rapproche le plus possible de ce que vivent ses personnages. Certains chapitres ne se composent que de dialogues, un autre est écrit sous la forme d'un “livre dont vous êtes le héros” [une des grandes passions enfantines de Samuel], etc. Pour rendre compte de l'état psychotique dans lequel sombre peu à peu Pwnage, le dernier chapitre qui lui est consacré est rédigé quasiment en une seule phrase, qui court sur plusieurs dizaines de pages… Cela nous donne l'impression d'être en apnée. J'ai mis un certain temps avant de comprendre pourquoi j'avais cette curieuse impression à la lecture. J'ai vraiment beaucoup aimé ces jeux stylistiques.

La trame qui suit l'histoire de Faye est celle que j'ai préférée. Elle traite de nombreux sujets, passionnants de mon point de vue : l'intégration dans une communauté rurale d'Amérique lorsque l'on est un étranger, le regard scrutateur de la société quand on est une jeune fille, le poids des conventions, le besoin d'émancipation, la gestion de la santé mentale et les tabous qui l'accompagnent, etc. le récit de Faye, c'est aussi celui d'une époque : celle de la fin des années 60, lorsque la jeunesse idéaliste manifestait contre la Guerre du Vietnam et luttait pour l'émancipation des femmes [Et guess what ?! : les violences policières, elles étaient déjà là au cas où tu penserais que c'est tout nouveau… ].

A travers les nombreux personnages que l'on croise dans cette petite brique de 950 pages, l'auteur traite de nombreuses problématiques [peut-être un peu trop ?] qui divisent encore l'Amérique d'aujourd'hui. Il démontre également comment la logique qui régit la société de l'image et du divertissement a totalement pris le contrôle de la politique, laissant de côté les idées pour le profit.

Que vous dire de plus ?! J'ai dévoré ce roman dont j'ai trouvé certains personnages terriblement attachants, d'autres particulièrement détestables. L'auteur joue d'ailleurs beaucoup avec nos sentiments vis-à-vis de ses protagonistes et, lorsqu'il lève le voile sur la véritable personnalité de certains, ça peut faire mal !
Lien : https://www.maghily.be/2020/..
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