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Critique de Merik


Voilà un titre bien trouvé pour cette immersion lumineuse dans la vie d'une famille amérindienne de nos jours, un titre explicite qui renvoie à la forme polyphonique de ce premier roman traduit en France de Brandon Hobson, mais aussi sur le fond en faisant écho au lointain et aux ancêtres cherokees de la famille Echota, leur culture et aussi leur malheur.

Et de malheur il en sera question, celui des Echota ayant perdu Ray-Ray en pleine adolescence motorisée un 6 septembre il y a quinze ans – le jour même de la commémoration de « La piste des larmes » pour les cherokee – par simple balle perdue par la police, sans reconnaissance par la justice mais avec des traînées de traumatisme chez les Echota.
Edgar gardera le souvenir flou d'un grand frère avec qui il jouait à construire des châteaux en légo, lui qui aujourd'hui éprouve « une sensation de transparence et d'isolement, une sensation de désir, un étouffement de son âme », sûrement à l'aune de son addiction à la meth. Éloigné de sa famille pour vivre avec Désirée, surnommée Rae en souvenir de son frère, il est attendu pour célébrer les « feux de joie » en souvenir de Ray-Ray.
Sonja avait 16 ans à l'époque et se souvient mieux de son frère imitateur et intrépide, elle qui préférait s'isoler en écoutant Joy Division, qui voudrait aujourd'hui être comme Colette pour ne pas se « soucier du regard d'autrui » en s'intéressant à un garçon plus jeune qu'elle.
Les parents sont sur le point d'accueillir Wyatt, la mère intervenante sociale au foyer local se démène pour ce jeune en instance de décision juridique sur sa vie future, un jeune aux accointances troublantes avec le regretté Ray-Ray, prêt à raviver la mémoire aliénée du père comme s'il lui avait « saupoudré sur la tête quelque chose d'angélique et d'invisible ».
Mais au milieu de ces voix du présent s'inviteront aussi celles du passé comme autant de guides aux fils invisibles mais sensibles, Tsala en particulier, des voix en écho de l'exil communautaire sur « la piste des larmes ».

La collection « Terres d'Amérique » prend ici les accents sensibles d'une culture indienne dans ce magnifique roman sans fioriture ni extravagance et pourtant difficile à lâcher, à la lecture fluide qui fera résonner les échos d'une forme de sagesse. Loin d'être plombé par l'injustice et le racisme larvé, il s'élève au niveau d'une aura cherokee en entremêlant voix actuelles et voix passées, en bousculant nos réflexes binaires de vie et de mort pour y semer des graines de métempsycose ou d'animisme, en ne manquant pas de nous émouvoir, nous attrister et nous éblouir à la fois. On en redemande.
Merci à la collection Terres d'Amérique de nous transmettre ces pépites !
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