Une enquête de Floréal Krattz, tome 1 : Les mystères de Strasbourg

Nous n'avions pas parlé d'avenir, mais rien n'était plus pareil.

"Tu es hésitant et craintif. Tu as peur d'être repoussé, parce que tu veux entretenir un amour idéal, pur et parfait. Tes sentiments pour elle, c'est de la littérature. Tu te donnes le beau rôle dans un drame romantique. Tu n'aimes pas la fille; tu en rêves, c'est tout différent. Tu aimes l'aimer. Tu t'aimes toi-même dans le rôle du troubadour adorant une dame lointaine et cruelle. Tu te rejoues la Nouvelle Héloïse en te regardant dans ton miroir quand tu te rases le matin. Tu te prends pour Werther en écrivant des poèmes. Mais ce ne sont pas des poèmes qu'elle veut, c'est un mari."

Le Chef est au centre d'une toile d'araignée complexe ; seuls deux ou trois malfrats doivent le connaître. Ensuite, un cercle plus large : ses hommes de main et ses encaisseurs, comme la Loutre et le Boucher, qui ne sont que des sous-fifres. Et un autre cercle : la pègre, les bordels, les bistrots, les bals publics, le paris, les jeux, les contrebandiers, sans doute aussi les menfiants... Ceux que le Chef soumet à son organisation, qu'il fait chanter ou qu'il rançonne, ou "protège", moyennant un pourcentage, comme un proxénète. Un proxénétisme étendu à l'ensemble de la société souterraine. C'est le crime moderne, le crime de l'âge scientifique et industriel.

"Alors Helmuth et le père Stoltz resteront en prison, et toi, Floréal, et Léa, vous serez en danger. Et même Emilie.
- Pourquoi?
- Parce que vous serez les seuls à connaître les mystères de Strasbourg."

-S'il arrivait à jeter la suspicion sur moi et mes compétences, je serais dans le pétrin. Je suis déjà mal vu, car on devine mes opinions politiques.
- Si les policiers se font la guerre aussi, l'enquête risque de durer.
- A qui le dites-vous, mon pauvre ami!"

Il était avec le commissaire Engelberger, qui n'a pas l'air d'un commissaire. (...) Il regarde les gens en souriant et parle peu. Son appartenance à la police se manifeste uniquement par le fait qu'il ne répond jamais aux questions que par d'autres questions. C'est agaçant au début, mais au bout d'un moment, on s'habitue.

Il me semble bien qu'elle a légèrement rougi, et qu'elle a jeté un rapide coup d'oeil à son frère. En les quittant, je lui ai serré la main en la gardant une seconde de trop dans ma paume. Elle l'a retirée vivement comme si je l'avais griffée. Qu'en conclure?