Citations sur Go to hell, tome 1 : Rebellion (10)
Assise sur le sol, le dos collé contre le panneau de bois et la tête enfouie entre ses mains tremblantes, elle avait dû rester dans cette position une bonne partie de la nuit à ressasser chaque geste qu’elle avait effectuer pour se sortir de cette situation, puis de sa cavalcade, pieds nus, à travers les rues de Fairfield. Elle avait passé des heures prostrées ainsi jusqu’à ne plus pouvoir supporter sa propre odeur, mélange de sueur et de peur. Finalement, elle s’était forcée à aller sous la douche dans l’espoir de se débarrasser de tout ça et du sang qui maculait ses vêtements. Une fois dans son lit, comme elle s’était recroquevillée sous les couvertures et s’était fait le serment de ne plus jamais se trouver désarmée et vulnérable. Elle ne voulait plus penser à cette nuit…
Damian fit tourner la clé dans la serrure et pénétra dans l’appartement de Cassie, suivi de Seven et d’une femme. Il flottait, dans le studio, une douce senteur ; un parfum provenant de la salle de bains dont la porte était restée entrebâillée. Seven poussa le battant de bois et inspecta la minuscule pièce. Un miroir ovale était accroché au mur et un tas de vêtements jonchaient le sol carrelé.
- ça manque de fioritures pour la piaule d’une jeune fille de dix-huit ans… Elle n’a que le minimum, lança-t-il en tirant le rideau de la douche.
Le pommeau reposait au fond de la bonde et continuait de baver un filet d’eau qui s’écoulait lentement dans le receveur. Seven ressortit de la pièce et observa son frère qui farfouillait dans les tiroirs du chiffonnier.
- Et tu dis que tu as entendu des rires ?
Je gardais les yeux rivés sur lui, suivant le moindre de ses mouvements. Mon coeur se mit à cogner dans ma poitrine. C'était la première fois que je ressentais quelque chose comme ça.
Ma marche se fit plus précipitée et je finis par me mettre à courir pour fuir les ombres des immeubles qui semblaient vouloir m’engloutir. Une silhouette jaillit brusquement de nulle part et me bloqua le passage. Je lâchai un cri, mélange de surprise et d’effroi, en essayant de modifier ma trajectoire, mais une main m’agrippa et me tira violemment sur le côté. Entraînée dans un endroit dévoré par les ténèbres, le bras pris dans un étau, je ne cherchai pas à appeler à l’aide. Cela n’aurait servi à rien. Au lieu de cela, je m’efforçai de repêcher un maximum de courage au fond de moi. Aveuglée par l’obscurité, je tentai de me débattre en frappant dans la direction de celui qui me retenait prisonnière. Les deux formes ovales d’un rouge incandescent qui brillaient devant moi me calmèrent immédiatement. Ephreïm. Une boule d’angoisse au fond de la gorge, je me figeai tout en plissant les paupières
Je gardais les yeux rivés sur lui, suivant le moindre de ses mouvements. Mon coeur se mit à cogner dans ma poitrine. C'était la première fois que je ressentais quelque chose comme ça.
Totalement indifférente à Eve, Cassie, dont la chevelure rousse étincelait de mille feux sous les lumières aveuglantes des spots, dansait frénétiquement. Elle sentait toute la tension qui emplissait la moindre parcelle de son corps. Les pulsions de la musique électronique la faisaient vibrer. Elle plongea ses mains dans ses cheveux et secoua la tête en tous sens, comme pour se vider l'esprit. Elle oublia tout ce qui se trouvait à proximité, consumant toute son énergie sans faillir. Marquer une pause, aussi courte fût-elle, provoquerait inévitablement le retour de ses sombres pensées, de son mal être. Le visage luisant de sueur, elle continua à se déchaîner.
Les seules personnes autorisées à pénétrer dans son intimité étaient les hommes. Elle les laissait entrer et les chassait quand elle estimait leur temps révolu. D'une part, parce qu'elle ne voulait pas les exposer à des risques inutiles, et d'autre part, parce qu'elle se lassait très rapidement. Les hommes n'étaient, à ses yeux, que des marchandises. Elle prenait, consommait puis jetait. Les plaisirs étaient fugaces, mais ça lui convenait très bien... Cassie pinça les lèvres et ressentit une irrésistible envie de se défouler sur la tête du premier venu. La jeune fille reprit son allure hautaine parce qu'elle n'avait pas mieux pour se protéger.
« Je me mis à chuchoter. N’importe quoi, des mots rassurants, des mots pour lui donner envie de se battre, des mots comme je n’aurais pas cru en prononcer un jour. J’aurais voulu lui dire tant de choses que j’étais pourtant incapable d’exprimer. »
La silhouette rapprocha alors la flamme d’une bougie noire posée sur le parquet et embrasa la mèche. Lentement, la silhouette ôta sa capuche puis plongea une main dans le sac qu’elle gardait sur l’autre épaule et en tira une craie blanche avec laquelle elle traça des figures sur le plancher. Rapidement, son dessin prit forme et révéla un immense pentacle. Une fois sa tâche terminée, elle sortit quatre bougies noires du même sac et les disposa sur chacune des pointes de l’étoile à cinq branches, les enflamma et rajouta celle qu’elle avait déjà allumée. Elle observa les lueurs orangées pendant un instant, sentant leur faible chaleur. Un minuscule nuage de condensation s’échappa de sa bouche entrouverte. Sa respiration se fit plus forte, le sang pulsait contre ses tempes. La pièce revêtait un nouvel aspect, comme si des milliers d’êtres invisibles s’étaient réunis et attendaient qu’elle les appelle. Le plafond aux poutres apparentes semblait s’arquer sous le poids des nombreuses toiles d’araignée poussiéreuses.