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Critique de Tachan


Quand on me propose une nouvelle série dans un univers de Dark Fantasy, vu mon amour du genre, je ne peux qu'avoir envie de m'y plonger. Quand en plus l'auteur a déjà une certaine réputation de noirceur comme Yuji Iwahara, auteur du Roi des ronces, je me dis que ça ne peut que rendre la chose immersive et spéciale. Ce fut effectivement le cas.




Le mangaka est donc connu sur le sol français, il est arrivé au milieu des années 2000 chez Soleil avec son titre emblématique le roi des ronces, qui dû rencontrer un certain succès puisque furent ensuite publiés chez différents éditeurs dans la décennie qui suivie : Nekoten chez Asuka, le monde de Misaki et L'oeil du loup chez Delcourt, Dimension W et Darker than black chez Ki-Oon. Sa production oscille entre histoires mignonnes au premier regard mais riche en regard critique sur notre société et histoires volontairement sombres avec ce même regard. Qu'il soit dans un univers réaliste ou fantastique, l'auteur a donc sa patte, une patte engagée et souvent meurtrie qu'il nous fait partager à travers un dessin très marqué.



C'est ce dessin que j'ai remarqué en premier dans sa nouvelle oeuvre, Clevatess, dont je vais vous parler présentement. En effet, après une couverture et des premières pages en couleur à la colorisation très marquée Yuki Iwahara avec ses grands aplats et ses ombres restreintes, on entre ensuite dans ce que je préfère de lui ses pages en noir et blanc très noires. J'adore son style très sobre, où les ombres grises et autres trames sont très peu présentes. J'adore son style où le noir est très sombre et très présent. Cela donne une touche très américaine, très comics, à ses planches malgré la rondeur de son trait typique des mangas. Il attache également une grande importance aux décors et autres arrières-plans quand ils sont présents qui permettent avec l'ambiance générale une vraie immersion dans ce monde classique de dark fantasy médiévale qu'il propose.

Comme beaucoup de ses contemporains japonais, quand Yuji Iwahara veut se servir de la fantasy comme décor à son histoire, il utilise un monde très classique et bien sûr moyenâgeux, alors que depuis la littérature romanesque nous a montré qu'on pouvait faire de la fantasy à n'importe quelle époque. Passons. Étant moi-même dans un mood fantasy médiévale, entre mes lectures de Seven Deadly Sins et Frieren, cela m'a parfaitement convenu. J'ai d'ailleurs eu un peu l'impression d'être à la croisée des deux, niveau conception de l'histoire.

Le mangaka nous plonge dans une histoire où le narrateur est le roi des démons, une créature proche du lion de foudre qu'on retrouve dans certaines histoires au folklore asiatique. Ce dernier se réveille et souhaite exterminer les humains, sauf qu'il tombe sur un survivant qui le met au défi d'élever un bébé humain pour voir si ce dernier ne peut pas le convaincre qu'on n'est pas tous mauvais.

Alors que le premier chapitre est brutal et nous plonge dans la dévastation avec l'affrontement totalement déséquilibré entre nous et Clevatess, la suite elle n'est pas du même tonneau et se propose donc de faire un peu un pas de côté pour analyser le rapport de ce démon à l'humanité et de l'humanité aux démons. J'ai beaucoup la simplicité avec laquelle ce sombre univers complexe nous était présenté. L'auteur a d'abord imaginé un premier chapitre piquant pour nous accrocher puis a changé de tempo, non sans garder un discours critique tout en nous présentant le petit monde des humains, les différents royaumes et peuples, pendant que Clevatess est confronté à la vie humaine.

Tandis qu'on aurait pu s'attendre à une histoire d'affrontement entre démons et humains, c'est quelque chose de tout autre qui nous est raconté. Sur le mode de ses histoires comme L'enfant et le maudit, Somali, The ancient magus bride, nous sommes plutôt sur la rencontre entre un être fantastique et un enfant humain qui risque de changer complètement sa vision du monde. Ainsi Clevatess va-t-il être confronté, avec humour, aux besoins primaires de l'enfant : le laver, le nourrir, le garder en bonne santé et va-t-il se rendre compte qu'il ne peut faire ça seul et pire qu'il ne peut pas demander à n'importe qui. Il va aussi être confronté, astucieusement, à la noirceur de l'âme humaine, qui parfois n'a rien à envier aux démons, quand il va tomber sur une bande de brigands.

L'auteur manie donc astucieusement certains clichés de la fantasy médiévale avec un héros démon dévastateur, une héroïne virginale, des bandits esclavagistes maltraitant femmes et enfants. Il y ajoute une petite touche d'exotisme rappelant au choix Berserk ou FullMetal Alchemist avec ce chef faisant des expériences pour créer une créature bestiale et démoniaque à son service, qu'il doit ensuite nourrir. Mais au milieu de toute cette noirceur, reste un espoir, les changements qu'on voit doucement s'opérer chez Clevatess au contact de son bébé humain, pour l'instant assez froid et calculateur, on a espoir que des émotions vont naître en lui et le changer. Une dynamique classique mais bien écrite.

Clevatess n'est donc pas le titre qui va révolutionner le genre, cependant l'auteur y met assez de lui pour le rendre singulier. Dans un décor de dark fantasy médiévale assez classique, il nous propose de suivre une de ces histoires où une créature surnaturelle impitoyable risque de s'adoucir au contact d'un jeune humain. Avec son dessin si typique, le mangaka nous ensorcelle vite pour plonger dans cette histoire sombre où la lutte entre humains et démons est permanente et où l'humanité même n'a parfois rien de très bienveillant. L'histoire d'une rencontre ou plutôt de rencontres, qui démarre lentement mais avec une belle profondeur et de belles promesses en prévision. J'ai hâte de poursuivre le voyage.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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