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Critique de Takalirsa


Philippe Jaenada a l'art de nous immerger dans les faits divers qui le passionnent. Je suis admirative de toutes ses démarches, de tous ses déplacements sur les différents lieux de l'affaire et cette connexion qu'il établit, psychologique, émotionnelle, avec les protagonistes à travers le temps. Dans la forêt où a été retrouvé le corps du petit Luc, à l'hôtel où a vécu le couple Léger, le dernier appartement où s'est réfugié Lucien à l'âge de 68 ans après ses 41 ans de prison, les établissements psychiatriques où est passée Solange… Jaenada vit littéralement son investigation.
Et il épluche tout. le moindre rapport d'enquête, chaque lettre envoyée par l'Étrangleur (« Il a soif de publicité ») avant et après son arrestation, la presse de l'époque. Il lit, analyse… et commente. C'est souvent perspicace, parfois drôle (il a le sarcasme facile). Mais à d'autres moments, j'ai eu l'impression qu'il se noyait dans les détails (a-t-on vraiment besoin de la biographie détaillée de chaque personne ayant eu trait, de près comme de loin, à cette sordide histoire?).

Je n'ai pas eu le sentiment que ce livre apportait grand-chose de neuf sur l'affaire (« un véritable sac de noeuds »), déjà l'objet d'une publication (« Le voleur de crime » de Jean-Louis Ivani et Stéphane Troplain auquel Jaenada fait de multiples références) : « On ne connaîtra jamais la vérité, toute la vérité ». On comprend assez rapidement que Lucien Léger a été un beau pigeon (et un grand imbécile) qui a bien cherché ce qui lui est arrivé : s'il n'avait pas joué (et aimé jouer) le rôle de l'Étrangleur (« J'ai voulu me donner un autre nom et créer un autre personnage »), s'il avait tout de suite dénoncé le véritable coupable au lieu de protéger un pseudo « ami » (« cet acharnement de plus de quarante ans à refuser sa culpabilité, inventer n'importe quoi pour pouvoir se dire pur et irréprochable envers et contre tout et tous »), il n'aurait pas autant exaspéré la justice (« Je me suis bien amusé ») qui a fait de lui, au final, « le plus ancien détenu de France », « condamné sans preuve, sans mobile, et finalement sans conviction ».

Après, il faut reconnaître qu'il était entouré de sales types que cela arrangeait bien. Jaenada pointe par exemple les manquements des avocats (notamment Maurice Garçon) et du juge Seligman. Yves Taron était une belle pourriture qui a bien profité de son statut de malheureux (beau-?)père. Suzanne Brulé était « une femme aux moeurs légères ». Jean Salce (l'ancien nazi) était à mille lieues de son image lisse et médiatique. Même le jeune Luc était un sale gosse (« un enfant fugueur, particulièrement difficile, peu studieux et instable »).
Et puis il y a Solange Léger. Une belle femme maladive dont la triste vie fait bien pitié… C'est sûrement la seule personne authentique de ce nid de monstres. C'est en tout cas comme cela que l'auteur la présente : quelqu'un qui est resté fidèle à soi-même (et à son mari) jusqu'au bout. C'est avec elle que le livre se clôt, apportant une touche de poésie à un monde fangeux.
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