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Critique de Arimbo



C'est le premier roman d'Henry James que je lis.
Un récit assez court, moins de 200 pages, incroyable, à l'atmosphère oppressante et à l'issue tragique, et bien difficile à résumer tant ce que l'on peut en tirer à la lecture est plein d'incertitudes, d'énigmes, de faux indices. En fait, il faut le relire au moins une fois pour s'en imprégner (en ce sens, pour ce qui me concerne, c'est comme les romans de Marguerite Duras, aussi chargés d'énigmes mentales, même si l'écriture en est très différente, plus belle et poétique chez Duras).

Dans un groupe d'amis qui se réunit le soir pour se raconter des récits macabres, l'un d'eux, Douglas, évoque l'histoire horrible dont il a eu connaissance par l'institutrice de sa soeur, une histoire vécue par cette dernière et dont elle lui a laissé le récit dans un manuscrit remis avant de mourir.

Cette institutrice, alors âgée de 20 ans, est appelée par leur oncle à enseigner à ses deux neveux orphelins, Miles et Flora, dans un château anglais. Les deux enfants sont absolument adorables, leur gouvernante Mrs Grose est une femme simple et bonne.

Donc, tout devrait se passer bien, mais l'enseignante ressent dans ces lieux une atmosphère menaçante jusqu'à ce que lui apparaisse sur une terrasse du château un homme dont la description qu'elle fera à Mrs Grose le fera identifier comme l'ancien intendant décédé, Quinn, un homme décrit comme foncièrement mauvais. Puis ce sera l'apparition de l'ancienne enseignante des enfants, Mrs Jessel, morte dans des conditions troubles: noyade, suicide? Et décrite aussi par Mrs Grose comme une mauvaise personne et entretenant des relations ambiguës avec Quinn. Va progressivement s'installer un climat inquiétant, dans lequel l'institutrice pensera que les enfants voient aussi ces apparitions, et qu'elle doit les protéger. Mme Grose l'accompagnera un moment dans cette démarche.
L'attitude des enfants sera tout au long du roman perçue comme ambigüe: que savent ils, se moquent-ils d'elle?
Suite à une fugue de Flora qui traversera un lac dans une barque (pourquoi fait-elle cela, est-elle attirée par le fantôme de Mrs Jessel, ou bien joue-t-elle un mauvais tour à l'enseignante? ) une crise liée à la réaction de l'institutrice à cet évènement amènera la petite Flora à ne plus vouloir la voir, à tomber malade et à partir du château avec Mrs Grose. L'enseignante restera seule avec Miles jusqu'à un dialogue paroxystique final se terminant par la mort de l'enfant.
Et le lecteur restera avec de multiples interrogations: quelles relations existaient entre Miles et Quinn, le cherche-t-il avec anxiété au moment où, à la fin du roman, l'institutrice dit à nouveau voir son fantôme, le hurlement qu'il pousse avant de mourir est il lié à sa vision de Quinn?
Ou bien, tout cela n'existe-t-il que dans l'imagination d'une enseignante paranoïaque et dérangée qui tyrannise les enfants en raison de sa folie et de ses visions?
Or, à la relecture du début du roman, on peut voir que cette personne n'était sans doute pas folle, puisqu'elle avait continué sa carrière, qu'elle avait été l'institutrice très agréable de la soeur de Douglas, l'homme auquel elle avait remis son manuscrit. Et cette relecture nous intrigue encore plus, car Douglas nous évoque que cette femme était sûrement amoureuse, mais que " le récit ne le dira pas, de façon littérale et vulgaire" Était elle amoureuse du jeune Miles?
Et de multiples autres questions: pour quelles raisons Quinn et Mrs Jessel étaient ils de mauvaises personnes? Quelles étaient leurs relations avec les enfants? Pourquoi Miles, garçon si gentil, a-t-il été renvoyé de son collège? Qu'avait il dit? Est ce que cela avait à voir avec sa relation à Quinn? Que savent les enfants? Voient-t-ils les fantômes de Quinn et Jessel?

Dans ce roman, l'auteur, avec un art incroyable de l'énigme, de la suggestion, du non-dit, nous plonge à la fois dans l'angoisse et la perplexité. Je trouve aussi que cette narration, sans cesse réitérée, de ce qu'imaginent les personnages sans que cela soit vraiment exprimé par eux, est une extraordinaire illustration de l'incommunicabilité entre les êtres
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