AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Meygisan


On retrouve un Nicolas Jarry en grande forme sur cet album même si celui ci est porté par des sentiments de désespoir et de désillusion comme si l'auteur souhaitait nous dire sa perte de confiance en l'humanité. Il n'y a qu'à constater comment il traite la race humaine, la place qu'il lui accorde dans ce tome est de loin la moins enviable, la moins valorisante, pour ne pas dire la plus merdique. L'homme est ici la pire crevure de bas niveau qu'on puisse imaginer. Et Jarry le décrit avec autant d'horreur et de dégoût à travers le personnage de ce roi imbu, despotique, dégueulasse, qui est à l'image de son arène de combat et de ses hôtes, abominable, infâme et monstrueuse, que dans les paroles qu'usent les autres races à son égard. Nicolas Jarry aurait il perdu confiance en l'être humain pour le descendre aussi bas...?
Toujours est il que l'auteur se sert à merveille de cela pour porter son propos par le biais de cet elfe bleu, Athé'Non, que l'on connaît désormais bien si l'on suit la série, lui aussi au plus bas de l'échelle à tous les niveaux, complètement à la ramasse , détruit par le deuil qui le hante désormais et bouffé de l'intérieur par la Kicha, cette drogue qui résout tous vos problèmes et guérit tout puisqu'au au delà de vous faire oublier les souvenirs, heureux comme malheureux et la souffrance sous quelle que forme que ce soit, et de vous rendre complètement accro, vous tue à petit feu. Et si cela ne suffisait pas, Athé'Non est également hanté par le spectre de son père, pas littéralement, qui incarne à lui seul la terreur générationnelle née de l'ultime épreuve face au Raïken-Kahlaal ( qui titre ce tome), sorte de monstre des profondeurs abyssales sensé représenter autant un dieu tout puissant des océans que le miroir de nos propres peurs intérieures, que l'on doit vaincre, dépasser, nous laisser nous traverser pour s'épanouir, aller au delà de nous pour finalement vivre.
Nicolas Jarry aurait pu faire simple mais ce n'est pas son genre, et l'on ne peut que constater et apprécier la multiplicité des niveaux de lecture de ce récit, se superposant sur les différentes "couches" de la personnalité et de l'histoire d'Athé'non.
Cela a beau être complexe, mais c'est finalement relativement simple puisque tout ramène inexorablement au deuil, et à ses différentes formes, du personnage, qu'il vit et doit surpasser à plusieurs niveaux. Jarry nous conte effectivement la renaissance de son personnage à travers les différentes épreuves qui vont lui permettre de lutter, d'accepter le deuil et la perte. le deuil de la relation paternelle et des "obligations" familiales, générationnelles, son deuil perso qui le ronge ( je n'entrerais pas dans le détail pour ne pas vous gâcher la lecture des tomes précédents si vous ne l'avez pas encore fait!), le deuil de lui même, de ce qu'il était avant.
Comme à son habitude, et c'est là la marque de sa patte, Nicolas Jarry nous raconte cette lutte à deux époques différentes ( je crois qu'on appelle ça une narration en ellipse), qui se font l'écho l'une de l'autre, pour mieux nous en faire comprendre les enjeux, l'importance et la profondeur. le récit de l'arène représente concrètement toutes les épreuves, les différentes étapes dans le processus proprement dit du deuil. Vous savez, ou pas, qu'il existe plusieurs phases dans le deuil, et consciemment ou pas, l'auteur les a parfaitement illustrées dans ce récit . (L'on pourra également y voir des allusions très nettes à notre propre pays dans son fonctionnement, la lutte d'Athé'non n'incarnant pas seulement son propre parcours, mais je vous laisse le soin de lire la critique d'Alfaric, que je salue au passage, qui explique cela bien mieux que moi, et dont je plussoie ( pour reprendre un terme qu'il affectionne) totalement les propos.)
Pour terminer, je ne peux m'empêcher de déceler une allusion religieuse dans la conclusion de ce récit et une allusion au Déluge. .
Vous l'aurez compris, il s'agit là d'un récit de Nicolas Jarry dans toute sa splendeur, un Nicoals Jarry comme je l'apprécie, un Nicolas Jarry qui nous rappelle que la fantasy, et la bd, ne sont pas des arts mineurs, un Nicolas Jarry qui élève la fantasy au delà de l'image habituellement niaise ou débilitante que certains bien penseurs veulent lui coller.
Merci Nicolas...
Commenter  J’apprécie          132



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}