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Critique de 5Arabella


Cette pièce est citée régulièrement dans les histoires de la littérature française, comme la première tragédie française. le XVIe siècle est un siècle fondamental en ce qui concerne la langue et la littérature, le théâtre n'échappe pas à la règle. Du Bellay, dans L'illustration et la défense de la langue française (1549), exhorte à écrire en français des oeuvres imitées ou inspirées des grands auteurs antiques. Comme les Latins ont imité les Grecs, les poètes de son époque doivent imiter ces illustres Anciens pour produire de nouveau des grandes oeuvres. Cette imitation doit aussi bien concerner les petites formes poétiques, que les grandes formes, épopée, comédie, tragédie (considérés aussi comme de la poésie).

Le défi ne tarde pas à être relevé, dès 1553, Étienne Jodelle fait représenter une comédie, Eugène, suivie à peine quelques mois plus tard, par cette Cléopâtre captive, une tragédie. La première représentation a lieu devant le Roi, une autre est donnée ensuite dans un collège, et remporte un vif succès. C'est la première fois que l'alexandrin est utilisé au théâtre en France.

La pièce décrit les derniers moments de Cléopâtre. Marc-Antoine est mort, la défaite de son armée est consommée, elle est prisonnière d'Octave, qui souhaite l'amener à Rome pour figurer à son triomphe. Il ne lui reste plus qu'à mourir, pour échapper à l'humiliation, et garder intact sa gloire de reine. Ce qu'elle parvient à faire, malgré la surveillance dont elle est l'objet.

Une pièce qui est très loin du théâtre auquel nous sommes habitué maintenant. Il n'y a pour ainsi dire pas d'action. de longues tirades, des monologues, des stichomythies, la présence d'un choeur….Nous sommes dans une sorte de déploration, d'élégie, d'un adieu à la vie. Et la langue a tout de même pas mal changée, certains mots ou tournures ne sont plus usités.

Les jugements sur cette pièce sont en général plutôt négatifs, mais j'y ai trouvé pour ma part beaucoup d'intérêt. J'ai aimé ces vers, cette façon de dire sa peine, de la chanter presque. Avec une certaine sobriété et grandeur, même si elles ne sont pas dépourvues d'une profonde douleur. Un véritable sentiment tragique, d'un destin contraire, d'impossibilité d'échapper à ce que l'on est, la traverse.

Certes, par la suite le théâtre classique prendra d'autres orientations, sans doute plus faciles à suivre pour la majorité des spectateurs. Plus d'action, une possibilité d'une fin heureuse éventuellement, des véritables dialogues, des personnages qui ne sont pas que des archétypes, mais des personnes. Mais je crois qu'il ne faut pas lire cette « première pièce » uniquement en comparaison de ce qui va suivre, et lui trouver de l'intérêt qu'en fonction des éléments qu'elle annonce ou la juger défaillante par ceux qui en sont absents. Juste la considérer telle qu'elle est, un autre possible du mot dit devant un public, plus basé sur une parole poétique et moins narrative, plus statique et hiératique sans doute, mais pourquoi pas ce parti pris.

Je trouve qu'elle mérite mieux que ces jugements condescendants que l'on trouve dans les manuels ; que ses beaux vers mérite une lecture, et pourquoi pas une écoute, si on arrive à en trouver l'occasion.
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