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Critique de motspourmots


"(...) je sais que le moment est venu de trier mes souvenirs pour écrire ton histoire. Une histoire dont je serais la monteuse. La menteuse. Celle qui comble les vides, synchronise gestes et paroles. Celle qui rejoue le passé. Je connais la langue des absents. C'est toi qui me l'a apprise."

Ces souvenirs, ce sont ceux que Constance garde de son père, Jacques mort du sida il y a trente ans. L'un des premiers alors que l'on découvrait chaque jour un peu plus les ravages de ce virus. Un père qui avait finalement choisi d'assumer ses préférences, un père aimé, admiré mais échappé d'abord du foyer puis de l'existence alors que la jeune femme à peine sortie de l'adolescence ne mesurait pas encore combien cette liberté faisait partie de son héritage. Ce sont donc les mots qui sont chargés de le faire revivre ou en tout cas de le sortir de l'ombre. de raconter cette époque et ses drames. Les mots d'une fille, confrontée à une situation peu ordinaire mais surtout les mots d'un fantastique écrivain.

"J'écris pour ne pas tourner la page. J'écris pour inverser le cours du temps. J'écris pour ne pas te perdre pour toujours. J'écris pour rester ton enfant."

Constance écrit, et Jacques apparaît, mais surtout les liens entre eux, ceux de l'enfance et ceux plus complexes de l'adolescence lorsque l'on se cherche des modèles, des repères. Constance écrit et l'émotion gagne, la vie et la mort se croisent, les trajectoires se suivent et parfois s'évitent ou se manquent. Se laissent distraire, berner. Constance écrit, les lumières envahissent les pages, les odeurs de l'enfance et les sensations de l'adolescence deviennent perceptibles. Passé et présent se rejoignent. S'enlacent. Se réconcilient au grand jour. Les poids s'allègent. Les épaules se redressent, les respirations se font plus douces. C'est beau.

L'écriture de Constance Joly est la grâce même. Sensible, pudique, aérienne, attentive à tracer cet écrin de vérité et d'amour. Je m'y suis coulée avec plaisir, touchée par cette rencontre revisitée à trente ans d'intervalle, bercée par la musique des mots qui accompagnent ce voyage d'une femme vers la fille qu'elle était et qu'elle demeure. Enfin dans la lumière.

"La vie emporte tout, l'amour et les visages de ceux que nous avons aimés, et pourtant nous agissons sans relâche. Nous nous construisons des digues dérisoires, bientôt emportées. Encore quelques minutes au soleil. Juste quelques minutes."
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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