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Critique de micetmac


Adoptant un parti pris romanesque audacieux, à savoir mêler les époques, Joncour affirme, avec son CHIEN-LOUP que le nature writing cher à Jim Harrison, Henry Thoreau, Jack London etc. n'est pas l'apanage des auteurs anglo-saxons.

CHIEN-LOUP propose deux pans narratifs aux temporalités éloignées. le devenir d'un village des Causses en 1914 alors que la grande boucherie vient de débuter son étripage de masse et celui d'un couple, une actrice inactive Lise et son mari Franck, producteur de cinéma hyper stressé et connecté. Ce couple qui vient de louer un gîte perdu au fond des causses du Quercy, loin de tout, de la wifi, des antennes relais, un endroit où on ne capte... RIEN.

Ce procédé qui pourrait s'avérer artificiel va se révéler payant car il entremêle judicieusement les tenants et les aboutissants. le style précis, épatant, de Serge Joncour s'affine habilement quand il passe d'un siècle à l'autre. Une mise en couleur pastel réaliste et empathique de la vie paysanne des années 1900, zébrée de réflexions acerbes sur la folie des hommes, leur courte vue, leurs peurs superstitieuses.

Ce n'est pas mieux en 2017. Les portables ont remplacé les dictons des anciens. le sevrage de Franck, qui voit les barres de réseau de son mobile disparaître, a quelque chose d'hilarant, de méchamment jouissif. Sa compagne n'est guère plus aimable, égoïste et inconsciente (on ne part pas en randonnée, en tong et sans carte !).

Et toujours, de tous temps, la nature. Sauvage. Ni bénéfique, ni maléfique, elle se contente d'être là. A l'image du chien-loup du titre qui apparaît, subitement, sans explications, qui se contente d'être là. Au début.

Franck a peur. Au début.

La peur traverse ce roman. La peur de l'autre. le dompteur allemand en 1914, le boche, bouc émissaire rêvé. La peur des nouveaux associés de Franck, plus vifs, plus adaptables, plus compatibles. Eux qui veulent vendre le catalogue de la boite de prod' de Franck à l'ogre Netflix.

Serge Joncour a bien compris que les prédateurs ultimes sont les GAFA, ce sont bien eux qui se repaîtront des restes.

Un livre auquel on ne peut pas reprocher grand chose, peut-être une fin un poil expédiée mais qui se révèle aussi subtilement et joyeusement amorale : la civilisation, la technologie ne sont que vernis à ongles peint sur des serres griffues.

Formidable roman.
Lien : https://micmacbibliotheque.b..
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