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Critique de Laureneb


Une lecture difficile, ô combien, mais indispensable. Berlin est en ruines, sans électricité, Berlin est affamée, Berlin n'a plus de chefs - ils se sont suicidés - et surtout plus d'armée. Seuls se terrent dans les caves quelques enfants fanatisés des jeunesses hitlériennes, des hommes trop vieux pour aller au front, et des femmes, beaucoup de femmes. Elles sont seules, car sans famille, sans logement, sans nourriture, sans protecteur ; seules face aux soldats soviétiques, ou, plutôt, face aux hordes de Moghols que décrit la propagande.
La mémoire allemande a longtemps tu les souffrances de ces femmes, violées en masse, esclaves sexuelles des Soviétiques. Il fallait reconstruire le pays, relever l'économie, juger les criminels de guerre et demander pardon, et, surtout, se taire face aux souffrances des déportés et des prisonniers de guerre, taire l'indicible pour ne pas être accusée de prostitution.
C'est aussi une réflexion sur la propagande et le bourrage de crânes qui réussissent à imposer à des jeunes gens de quinze ans d'aller se battre, qui manipulent les opinions avec ce qu'on n'appelle pas encore fake-news, qui déshumanisent les adversaires en les dépeignant comme des bêtes, qui effraient aussi avec la toute-puissance des services secrets et des polices politiques ; les deux camps sont montrés comme étant exactement les mêmes dans ce domaine.
Le dessin de Nicolas Juncker ne montre pas frontalement les viols, il suggère avec pudeur, en mettant au centra du récit ses personnages féminins. Ces deux femmes parlent chacune la langue de l'autre, elles auraient pu être amies, sans la guerre et sans les divisions idéologiques imposées par la propagande. Les visages des personnages sont très creusés, leurs yeux ressortent, exprimant avec force toute la souffrance, la rage, la haine. Malgré tout, la dernière case apporte un peu de légèreté et d'espoir, étant la seule en couleurs.
L'histoire s'empare peu à peu des souffrances des Berlinoises, et lève peu à peu le tabou sur des souffrances qui auraient touché peut-être 90% des femmes de Berlin en 1945.
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