AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Luque74


"Très cher père, Tu m'as demandé récemment pourquoi je prétends avoir peur de toi. Comme d'habitude, je n'ai rien su te répondre."
C'est avec ces mots que Franz Kafka commence son ouvrage dans lequel il essaye délibérément de répondre à son père. Mais, nous découvrons vite que ce dernier, en posant cette question, n'a pas même effleuré les racines du problème le concernant ainsi que son fils. Au contraire, il a simplement cueilli une feuille qui n'est qu'une simple conséquence de phénomènes beaucoup plus profonds.


Ainsi, Kafka essaye, avec une certaine lucidité, de déceler ce qui caractérise sa relation avec son père. En nous autorisant à accéder à cette conversation si privée, l'auteur nous fait part des conséquences qu'a eu son foyer sur lui. En effet, Kafka vécu plutôt mal la relation avec son père car il subit des pertes de confiance en lui, des difficultés à se marier, jusqu'à une forme d'hypocondrie. La composition de cette relation acide n'est pas pourtant exceptionnelle. Un père agissant avec une autorité paternele sévère mais commune pour la fin du XIXe siècle, puis teinté d'un certain narcissisme. de l'autre coté, un enfant qui, subissant ce caractère, ne trouve qu'à s'en échapper (littérature, amis), et qui éprouve progressivement une répulsion vis-à-vis de ce dernier.


Mais, Kafka ira plus loin en déculpabilisant les protagonistes notamment ne en affirmant : "je te crois, moi aussi, absolument innocent de l'éloignement survenu entre nous. Mais absolument innocent, je le suis aussi." En effet, selon lui, personne n'est responsable de cette relation. Elle ne serait due qu'au fait que lui et son père interagissent. de fait, Kafka et son père seraient dénués, par nature, de toute intention néfaste envers autrui. Leurs caractères étant singuliers et immuables, le simple résultat de ces deux réactifs serait le seul responsable des conséquences subies par Kafka. Kafka dit ainsi : "J'aurais été heureux de t'avoir comme ami, comme chef, comme oncle, comme grand-père, même (encore qu'avec plus d'hésitation), comme beau père. Mais, comme père, tu étais trop fort pour moi"

Toutefois, ou paradoxalement, Kafka aime son père. C'est ainsi qu'il nous avoue voir une larme se libérer sur sa joue en pensant au sourire de son père, regardant son fils malade depuis le seuil de sa chambre, se "born[ant] à [le] saluer de la main, par égard pour [sa] fatigue". Il affirme même : "A de tels moments, l'on se couchait et l'on pleurait de bonheur, et je pleurs maintenant encore en l'écrivant".


Cette relation m'évoque certaines crises d'adolescences contemporaines. Dans la mesure où l'enfant ne veut pas naturellement de mal à l'adulte, ni l'inverse, mais que le contexte, le rapport d'autorité et certains phénomènes socio-physiologiques chez l'enfant, poussent incontestablement le foyer vers la conflictualité. Mais j'admets bien que le parallèle est à nuancer en intensité car les crises d'adolescences s'estompent avec le temps ou un éloignement géographique, tandis que Kafka reste lié à son père à vie. Il dit d'ailleurs à ce sujet : "Sauf que les choses se passaient en réalité comme dans ce jeu d'enfant où l'un tient la main de l'autre, la serre même et s'écrie en même temps : "Mais va-t'en donc, va-t'en donc, pourquoi ne pars-tu pas ?"


Ainsi, je vous conseille vivement ce livre qui doit être un ouvrage clé dans l'oeuvre de Kafka. En effet, dans La métamorphose, ce rapport à l'autorité paternelle est souligné aussi. de plus, comme tout bon livre, il est doté d'un coté intemporel, qui rend le livre poignant car nous nous projetons dans ce dernier.
Commenter  J’apprécie          10



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}