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Un courrier qui n'est jamais parvenu à son destinataire.
Franz Kafka a vécu toute son enfance dans la crainte de son père, un homme autoritaire et malveillant. A l'âge adulte, alors que la peur de ce père existe toujours, dans cette lettre qui lui est adressée, Franz Kafka essaie d'analyser les conséquences de cette relation destructrice. Cette domination paternelle qui a fait de lui un homme angoissé, solitaire et introverti, incapable de s'engager durablement dans une relation amoureuse.
Une angoisse qui a aussi fait naitre et a porté une oeuvre incomparable.
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J'ai écouté la Lettre au père de Franz Kafka (1913) sur un podcast de France Culture datant de 1997 et toujours disponible dans une traduction de François Rey. Il s'agit de larges extraits lus en continuité avec beaucoup d'énergie et de conviction par André Dussolier. le ton est juste, le plus souvent dur et cassant avec des modulations qui font aussi entendre l'incompréhension douloureuse et la tristesse de Kafka.
Tout dépassement du conflit père-fils est impossible tant les personnalités sont opposées, tant le traumatisme du fils est grand. Hermann Kafka est fort, robuste, plein d'appétit et fier de sa réussite sociale. Franz est frêle, maladif, anorexique, inquiet. Kafka reproche à son père de l'avoir totalement inhibé. A force de subir sa tyrannie, ses ordres absurdes, ses châtiments injustes, Franz s'est auto censuré, il est devenu docile et honteux de l'être. le plus terrible c'est que le fils devenu adulte a accepté de demeurer dans l'ombre du père en refusant le mariage bourgeois qu'il estimait encore trop lié au père. le seul échappatoire possible et la seule expression possible a été l'écriture, un monde inaccessible au père et qui lui répugnait. Mais jusque dans ses livres, Kafka remarque qu'il n'est pas libéré de son emprise car il s'agit encore de lui et de se plaindre de lui.

« C'est l'une des lettres les plus célèbres que compte la littérature contemporaine. En 1919, Franz Kafka a 36 ans, et déjà l'essentiel de sa production littéraire derrière lui – il mourra cinq ans plus tard. Depuis les montagnes de Bohême où il séjourne en compagnie de son ami Max Brod, il écrit à son père une longue lettre, qu'il ne lui remettra jamais. “Une lettre d'avocat”, écrira-t-il à son amie Milena Jesenská, qui met en oeuvre, point par point, une stratégie de défense. Plaidoirie, donc, mais aussi règlement de compte, tentative d'auto-analyse, missive d'amour et de haine, publiée pour la première fois en 1953 seulement, dans la première édition des oeuvres complètes de son auteur. Elle éclaire l'oeuvre d'un jour nouveau, mais peut aussi se lire et s'entendre pour elle-même. En 1997, pour l'émission “Parole donnée”, André Dussollier en faisait résonner les mots au cours d'une lecture organisée en public dans le grand auditorium de la Bibliothèque Nationale de France. »
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La Lettre au père écrite par Kafka alors qu'il est âgé de 36 ans, est un peu le Procès de son père.

Père tyran, incapable d'affection, il écrasera l'enfant par sa toute puissance, par son ironie, ses injures, son rire méchant. Il est trop fort pour cet enfant fragile et craintif. L'enfant ne pourra pas devenir un adulte confiant et serein. Il sera toujours poursuivi par l'ombre géante de ce père, il ne pourra jamais rivaliser avec lui. Aucune compréhension entre les deux n'est possible. Les outils de l'éducation du père ne sont pas adaptés à cet enfant sensible.

Le père reproche à son fils sa froideur, son ingratitude, sa bizarrerie. L'enfant rend le père responsable de l'homme qu'il est devenu, de son incapacité à vivre heureux, à s'affirmer par ses propres moyens.

Comment se libérer de l'emprise de ce père ? En fuyant grâce à l'écriture. On retrouve en effet beaucoup ce thème de la domination du père dans ses écrits. le mieux ; « l'extrême degré de ce qu'un homme peut atteindre », serait de fonder une famille. Mais cet acte de mariage serait trop lié à son père. Il ne peut acquérir son indépendance que par un acte tout à fait étranger à son père, pour qu'il ne souffre pas de la comparaison.

Il est donc resté l'esclave de ce père. Mais il en est aussi le parasite, puisqu'il reste bien à l'abri dans le confort offert par ce père, tout en le tenant responsable de ses échecs de son incapacité à vivre son indépendance. Il se délivre ainsi du poids de ses responsabilités.

On peut se reconnaitre dans cette lettre. Chacun se demande un jour comment nous sommes devenus l'adulte que nous sommes. Quelle est la part de responsabilité parentale dans cette construction, dans nos échecs, dans nos angoisses, dans nos choix ? Quelle vie aurions-nous eu si nous avions reçu une autre éducation ?


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C'est en écoutant Laurent Seksik récemment au festival de correspondance de Grignan parler de son dernier livre sur Kafka qu'il m'a donné envie de lire cette lettre au père de Kafka.
D'après lui, dans les familles juives, ce ne serait pas la "maman juive" dont on a l'habitude de nous abreuver de commentaires qui seraient l'élément déterminant pour un fils, mais le père.
Il faut tout de suite préciser que pour Laurent Seksik,la relation filiale: père/fils est déterminante.
A tel point qu'il dit lui-même qu'à travers ses différents livres, il pointe toujours le père juif, notamment dans Romain s'en va t-en guerre.
C'est un point de vue intéressant, d'autant que lecteurs ou non de Romain Gary, la seule chose qui domine , c'est cette mère formidable pour certains ,castratrice et destructive pour d'autres.
Pour en revenir à la lettre de Kafka, Laurent Seksik considère que cette lettre est déterminante pour comprendre l'univers Kafkaïen, accordons nous de le dire assez souvent opaque et difficile d'accès.
Laurent Seksik affirme que le père de Kafka était un homme tyrannique mais aimant.
Peut-être, néanmoins après la lecture de cette lettre, je n'aimerais pas croiser ce père . cet homme.
Je suis incompétente pour savoir quelle part aura pris le père de Kafka dans l'oeuvre de ce dernier.
Néanmoins, le père de Kafka était un homme , à la lecture de cette lettre, un homme autoritaire sans équivoque et on peut comprendre sans peine la crainte, pour ne pas dire la terreur qu'il a engendré toute sa vie pour Kafka.
La culpabilité est le point culminant qu'on retrouve à maintes reprises dans cette lettre, Kafka se sent coupable sans savoir exactement de quoi.
Laurent Seksik parle d'établir un lien entre cette culpabilité et le roman de Kafka : le procès.
Un petit bémol pourrait être apporté à cette lettre.
Il s'agit de placer le père de Kafka dans la religion juive et ce lien même ténu d'après Kafka pourrait nous faire comprendre que pour le père certaines choses ne se faisaient pas, n'étaient pas envisageables.
Récemment, j'ai vu une pièce au festival d'Avignon qui s'appelle : Je m'appelle Asher Lev, d'après un livre d'un roman de Chaïm Potok.
Si j'y fais référence, c'est que le fils Asher veut devenir peintre et que sa peinture, son art engendrera l'incompréhension pour son père, une zone interdite qu'il ne pouvait franchir et de ce fait accepter son fils tel qu'il était.
Peut-être que le père de Kafka ne pouvait tout simplement pas comprendre son fils.
Car , au final, cette longue lettre n'est qu'un épouvantable cri d'incompréhension !
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Hermann ["Herr Mann" ou "Monsieur L'Homme"] Kafka a brisé les ailes de son fils Franz "le Choucas"...

Oh, sans le vouloir, bien sûr... ni même l'imaginer et — au final — le savoir... Puisque par décision de l'émetteur, cette longue lettre n'est jamais parvenue à son destinataire naturel.

Un témoignage capital et universel nous est ainsi livré.

Par son arrogance et sa foutue "prospérité", sa redoutable inconscience et son mépris des classes sociales inférieures, "Monsieur Père" l'intrusif, boutiquier prospère fier de son élévation sociale, a été jusqu'à s'immiscer dans les affaires sentimentales de son fils : insultant la tendre Julie Wohryzek (rencontrée en février 1919 à la "Pension Stüdl" de Schelesen) qu'il accuse d'avoir séduit son fils "en arborant un corsage recherché"... [Cf. cette "Lettre au Père" ainsi que les informations biographiques du "Kafka" de Klaus WAGENBACH].

Franz ne se rebelle pas. Il intériorise le conflit. Il cède, se soumet, tente de surnager à l'agression caractérisée...

A-t-il assez âprement défendu — devant pareil monstre bienveillant et d'allure si "bonhomme" — l'honneur de sa fiancée Julie ? [hypothèse heureuse et crédible que nous avons pu explorer en bâtissant patiemment le petit récit "Heiraten (Noces)"].

Seulement voilà : Franz ne "s'écrase" pas mais donnera finalement raison à son bourreau...
Franz culpabilise.
Parce que ce fils — comme tant de fils — aime simplement son père.
Et si on l'écrase, si on doit l'écraser, c'est au fond qu'il le mérite...
Ne mérite-t-il pas, d'ailleurs, les mille châtiments que l'avenir lui promet ?

Telle cette monstrueuse maladie qui finira [le 3 juin 1924] par le faire périr de douleur, d'aphonie, d'inanition et d'asphyxie (laryngite tuberculeuse terminale)...

La connerie nazie, elle, viendra à bout de la tendre Julie Wohryzek (assassinée le 26 août 1944 à Auschwitz) et des trois soeurs de Franz, dont la chère Ottilie/"Ottla", tuées dans les mêmes atroces conditions.

Alors, si la soeur de Gregor Samsa broie — au final — cette "misérable vermine" de frère dégénéré, de son habile coup de balai, quoi de plus naturel et, au fond, de presque "compassionnel" ?

Tous les mystères de la psyché de Franz Kafka, ce "fils éternel" [Cf. "Franz Kafka. der Ewige Sohn" de Peter-André ALT, 2005, non encore traduit] en ces quelques pages douloureuses et poignantes.

Pères, futurs pères, ne broyez pas, ne broyez plus vos enfants ! Par simple pitié pour eux...

Et tous n'écriront pas "La Métamorphose" [1915] en humble, immortelle et surprenante thérapie...
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La Métamorphose avait été un véritable coup de coeur pour moi. L'univers kafkaïen m'avait complètement retourné. J'avais une terrible envie de m'y replonger pour pouvoir retrouver ce style unique et d'une puissance rare. Cette lettre publiée en 1952 de manière posthume a été écrite à l'attention d'un père. Kafka est un juif et praguois de naissance qui fait preuve de beaucoup d'audace dans l'ensemble de son oeuvre où il traite souvent les mêmes thèmes comme la famille et son oppression, l'amour féroce et le manque total de communication. On peut lire ce petit livre indépendamment des autres même si l'auteur fait des liens entre sa vie et son oeuvre (Cf. le Procès). Dans cet ouvrage, Kafka devient procureur de son père mais il le défend pathétiquement par moments. Ce père a dévalorisé ses enfants, il les a découragés mais aussi humiliés. La mère est aimante mais soumise à un mari tyrannique. Les 80 pages qui composent cette lettre sont d'une violence extrême, on plonge dans l'intimité de Kafka qui constitue un monde inexploré. La sincérité de l'auteur est particulièrement touchante, il se révolte contre une éducation stricte qui lui a laissé des séquelles à vie. L'éducation qu'un enfant reçoit définit son futur, ses émotions et sa vie en générale. Kafka n'a pas réussir à vivre une existence normale à cause de cette haine profonde qui n'a cessé de le ronger, il avait peur de décevoir son père à chaque étape de sa vie. Ses sentiments sont décrits avec beaucoup de précision, les déchirures sont profondes et la souffrance exprimée ici est terrible. Cette lettre doit être lue au moins une fois dans sa vie, elle témoigne des angoisses européennes d'une époque tourmentée.
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Comme j'ai lu très récemment le témoignage de Céline Raphaël, intitulé La démesure, j'ai repensé bien sûr à cette fameuse Lettre au père.
C'est une lettre dont chaque page, chaque mot, même, du fait de la concision du texte, serait à détailler, et il y aurait tant à en dire..... Mais cette concision même fait la beauté de ce texte, sans doute.

C'est un texte qui démarre sur le mot "peur", et c'est un texte encore habité par la peur, du moins au début. En effet, Franz Kafka commence par le disculper, ce père. "Absolument innocent". Ben voyons.Oui, dans un sens, bien sûr. Si le père est ce qu'il est, c'est qu'on a fait de lui ce qu'il est. C'est l'éternelle répétition de l'histoire. Donc, une histoire familiale où l'on note une réussite sociale manifeste, un père donc qui a travaillé tôt et qui pense qu'il suffit de délivrer ses propres enfants (car cette lettre ne concerne pas que le fils, les filles -les soeurs- sont évoquées aussi, et même la nièce) des difficultés matérielles qu'il a endurées, lui, pour qu'ils lui soient reconnaissants. Que du classique.

Mais très vite, le réquisitoire démarre sur une phrase magnifique du père: " Je t'ai toujours aimé et quand même je ne me serais pas comporté extérieurement avec toi comme d'autres pères ont coutume de le faire, justement car je ne peux pas feindre comme d'autres".
C'est un typique exemple du double discours si déstructurant : je t'aime et si je ne te le montre pas, c'est que je ne sais pas feindre.......... Sans commentaires. Il aime qui, là? L'enfant tel qu'il est, ou celui qu'il aurait voulu avoir, c'est à dire lui renouvelé? Tout est dit.

Tout ce qui est à même de détruire la personnalité d'un enfant, une logique de mort dont peu réchappent, d'ailleurs, ou bien abimés:
- l'écrasement et l'humiliation physique (la cabine de douche) et spirituel, une seule vision des choses est acceptable, et ce jusque dans l'inconséquence (très vite notée par les enfants, ça....) et le manque de logique.
- la remise en cause par l'ironie, la moquerie de toutes les paroles, les sentiments, les émotions de l'enfant, ce qui fait qu'il n'a plus qu'une alternative, tout cacher
- l'encore classique " fais ce que je te dis, ne fais pas ce que je fais" (le repas, la religion), ma loi est pour toi, elle n'est pas pour moi, comment dès lors comprendre cette loi?
- la peur entretenue de la violence physique (avec l'excellent exemple du pendu), qui même si elle est rare, est toujours suggérée et entretient la même et constante terreur
- l'ambivalence, avec de temps en temps une éclaircie qui entretient l'amour (même les enfants les plus maltraités aiment leurs parents..): le regard inquiet du père à l'enfant malade, par exemple. Après, il attend d'autres signes, et c'est reparti.
-la tyrannie appliquée dans tout l'univers proche, qui s'étend aux employés et s'arrête complètement à l'extérieur de ces deux cadres, familial et professionnel. le désarroi que peut ressentir un enfant devant cette complète transformation de son père dans un cadre différent, le secret qu'il doit garder, la culpabilité qu'il ressent par assimilation.
- l'emprise, ce que Kafka quelque part nomme "amour" en parlant de la jalousie du père pour ses amis, mais qui n'est pas du tout de l'amour, mais un besoin de possession totale
- le chantage à la maladie, le surmenage, etc

-et enfin, la mère........ Dans un film australien, Shine, l'histoire de David Helfgott, un père détruit son fils, pianiste virtuose, et le rend fou. C'est un peu la même chose, la mère n'est qu'évoquée. Et pourtant. Quel rôle important a la mère dans ces drames familiaux. Là, Kafka le dit aussi, la mère aime plus son mari que ses enfants. Et c'est ce qui complète le tableau, elle a une position très ambivalente qui est juste suggérée, mais qui n'a pas dû aider un fils à véritablement faire ce qu'il avait à faire, c'est à dire ou se révolter, ou au moins fuir.
Cela aboutit donc fatalement à un personnage qui par définition rate tout..Normal, pour le personnage le plus important de sa vie, ce père pervers (avec lequel il ne cesse d'entretenir une relation d'un masochisme assumé d'ailleurs, faut être deux pour que ça continue, ce genre de relations), dans tout ce qu'il fait, dit, ressent, exprime, il n'y a jamais rien eu à admirer. Et il le constate avec une lucidité admirable. La fin de cette lettre, les réflexions sur son incapacité à fonder sa propre famille et les propos prêtés au père sont un miracle d'intelligence et d'introspection.

Ce texte devrait être plus lu, à mon avis, tant il est puissant et intelligent, mais il parle peut être plus à une certaine catégorie de lecteurs, ceux qui ont vécu d'une manière ou d'une autre ce que Kafka décrit. Qu'ils aient pu -un peu- dépasser ce genre d'enfance, ou pas encore. C'est d'ailleurs à mon avis un texte qui pourrait en aider beaucoup à ce que l'on nomme maintenant la résilience.

Je ne pense pas que ce texte soit vain parce qu'il n'a pas été envoyé. A mon sens, il ne servait à rien de l'envoyer, car son destinataire, tel que décrit (et je n'ai aucun doute quant au réalisme du portrait) n'était pas à même de le recevoir. Enfin, intellectuellement et affectivement, non. Ce genre de personnage ne peut se permettre une telle déstabilisation, tant son identité tient justement dans les tares reprochées. S'il les admet, il n'est plus rien.Mais cette analyse, de par sa lucidité, aurait pu être le début d'une autre étape dans la vie de Kafka, lui permettre de repérer les situations dans lesquelles il se remettait lui-même dans la même position qu'on l'avait contraint à adopter dans l'enfance. Il avait tout compris........ un peu tard. Or, pour se sortir (plus ou moins...) des ornières (à savoir rejeter tout le malheur de sa vie sur l'enfance vécue, même si elle a été tragique), il faut impérativement, et le plus tôt possible, comprendre ce que l'on a vécu. Céline Raphaël l'a fait.
Maintenant, c'est évident que cette enfance dramatique, et l'incapacité de la dépasser, cette pure création -quasi expérimentale (et pourtant si fréquente..) -d'une névrose majeure d'angoisse, a permis l'oeuvre de Kafka. Qui n'est qu'angoisse.
Après, c'est tout le problème de la souffrance nécessaire-ou non- à la création.






Lien : http://www.youtube.com/watch..
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Merci d'avoir écrit cette lettre. Je te vois parler à mon père ce que je n'ai jamais fait. Mais je t'ai toujours aimé. Texte traduit par Marthe Robert. En effet, je me retrouve en toi. Fais ce que tu veux. Tu es majeur. Impossible d'avoir des relations normales avec toi. Qu'il crève donc! Ce chien malade. N'a jamais été père.
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Une lettre poignante, vibrante d'émotion! Écrire à son père, c'est toute une vie d'enfance d'exclu qui se déballe, celui-là que le père a de la peine à dénicher la nature. C'est aussi une vie d'adulte profondément désorientée, resté prisonnier de son enfance. C'est avec sensibilité que Kafka parle de cette domination paternelle qui ne lui a pas permis de s'épanouir ni en société, ni dans une relation amoureuse, au contraire, ça n'a fait qu'affecter sa personne, qu'il n'avait qu'une seule option, la fuite. Fuir tout, et s'enfoncer dans sa solitude! En même temps, on reconnait par là la source de ses inspirations assez distinctes !!!
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Il y a des écrivains qui font peur (à tort ou à raison), Kafka est de ceux-là pour moi. J'ai lu La Métamorphose au lycée , et n'y avait absolument rien compris, et puis, passé la trentaine, je vois et entends de plus en plus de choses intéressantes sur cette oeuvre et son auteur. Pourquoi ne pas lui redonner sa chance alors ? Mais avec des étapes !!

Et c'est là qu'intervient la Lettre au père. Ce petit ouvrage n'est pas une fiction. C'est une "véritable" lettre que Franz Kafka a écrit à son père, mais il ne lui a jamais donnée. ( Il paraît que cette lettre contiendrait des clés pour comprendre la si fameuse métamorphose du jeune écrivain tchèque !)

N'étant pas une fiction, le fil est parfois dur à suivre car Kafka couche sur le papier toutes ses peines à mesure qu'elles lui viennent.
Malgré cela, cette lettre à son père se révèle intéressante à plusieurs points de vue. Après sa lecture, plus besoin de lire une biographie sur l'auteur tant on ressent tous ses sentiments contraires vis-à-vis de son père qu'il décrit comme un stentor lui inspirant la peur autant que l'admiration. On sent bien aussi le désarroi du jeune Franz face au manque d'empathie que son père semble avoir pour lui. Et tout est sujet à désaccord entre le père et le fils ! Deux visions s'oppose, celle plutôt matérialiste et distante ("à l'ancienne") du père, et celle de Franz qui fait les études de droit comme on l'y oblige alors qu'il est passionné de théâtre yiddish et autres plaisirs artistiques dans la Prague effervescente au tournant du siècle. Mais aussi le rapport que chacun entretien à la religion (le judaïsme), etc
Ce qu'il dit de ses besoins de jeune garçon et de jeune homme sur le besoin d'encouragement mais aussi de celui de se démarquer est assez moderne pour une époque où les sentiments des enfants sont très peu (pour ne pas dire pas du tout) pris en compte.

Toutefois, malgré les petites bassesses, jalousies et déceptions, c'est tout de même le point de vue de l'homme "en maturation" qui se dégage, comprenant qu'aucun deux n'est totalement victime ou bourreau. Mais, à titre personnel, Franz se demande si la parentalité n'est pas , pour chaque individu, synonyme de sacrifice de bonheur personnel et épicurien ... et quand un autre être que soi-même compte, l'erreur est quasi inévitable. Alors, est-ce vraiment impardonnable ?
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