J'ai fermé les yeux.Petit à petit,dans son étreinte rassurante,j'ai puisé l'énergie qu'il me fallait pour garder en moi les différents orages qui se succédaient depuis plusieurs jours.
Je voulais de l’animation,du bruit,du mouvement.Mais nous étions seuls.Nous ne connaissions personne.
Il est temps de changer de vie. Nous sommes capables de saisir les opportunités quand elles s'offrent à nous.
Ma réflexion me donnait des ailes à présent. Dans les semaines à venir, j’allais entrer en contact avec chacun de nos voisins. J’allais monter un dossier sur chaque habitant, noter un maximum d’informations. Bien me préparer, pour mieux les atteindre. Que savais-je sur eux, pour commencer ? J’ai pris un bloc vierge et un stylo et je me suis mise à écrire.
Je ne suis pas prête parce que ... l'idée est trop jeune encore. Si on en parlait, ce serait comme le souffle du vent qui fait envoler la graine. Faut qu'elle prenne en terre.
Que savait-il de la connivence qui se construit au sein d'un couple au fil des années ? De la force aimante d'une famille ?
« Bonjour, ma toute belle. »
Dieu, qu’il était beau !
Il m’a embrassée sur les deux joues, juste un tout petit peu trop près des lèvres pour être une bise chaste et amicale. Et moi, perdant complètement pied, je l’ai laissé faire.
« C’est mon anniversaire, aujourd’hui.
— Ah ? Bon anniversaire.
— Merci. Pour fêter ça, je t’emmène dans un endroit spécial. Tu vas voir. »
« Damien ? »
Pas de réponse. Il n’entendait jamais lorsqu’il était absorbé dans ses jeux.
« Damien ? »
Autant parler au mur.
« Damien Roland ? Tu ne pourrais pas te tourner vers moi cinq minutes ? Ton dos est joli, mais ce n’est pas avec lui que j’ai envie de discuter.
— Attends. Je sauvegarde. »
Il a fini par quitter le micro, puis il est venu saisir mes seins à pleines mains. Je me suis dégagée d’un geste brusque.
« Arrête. J’ai besoin de te parler.
Je revenais systématiquement aux mêmes conclusions. Nous ne sortions presque plus, rarement en famille et jamais à deux. Nous n’avions pas d’amis dans cette ville de deux millions d’habitants. Pourtant les rencontres étaient la clé de mon appropriation de notre lieu de vie. À Lyon, pour me sentir chez moi, je devais connaître du monde.
Un soir après le coucher des enfants, mon cher et tendre s’est installé à l’ordinateur, comme à son habitude. Je l’ai regardé quelques instants, puis je me suis lancée.
Dans les faits, c’est sur mon humeur que j’ai pu mesurer les changements les plus palpables. De positive je suis devenue sarcastique. De bon samaritain, concierge. Amoureuse, je le suis toujours. Mais réaliste, revendicatrice et un brin hypocrite.