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Citations sur Le quart (17)

(DÉBUT) Le lieu : la passerelle d’un vieux cargo. Mirador sur l’immensité. Le jour, les 360 degrés de l’horizon, « le vase sans défaut de la mer » (Saint-John Perse), seule expérience sensible que nous puissions avoir de la rotondité de la terre. Parfois au loin une cote basse qu’annoncent des odeurs, des oiseaux, des amoncellements de nuages. La nuit, l’horizon a disparu, on est dans le noir cosmique………………………….
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_ (FIN) oui, dit mollement le commandant. Mais maintenant qui va décapeler les aussières ?
_On s’est entendus avec deux types à terre. Montons. Le télégraphe sonnait comme la clochette d’une chèvre.
-Lève l’ancre.
-Déborde devant,
La proue du Pythéas déborda à bâbord.
Sur le quai les aussières furent décapelées par deux femmes en robe de soie. Quand elles eurent fini, elles agitèrent leur mouchoir en signe d’adieu.
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Je boirai encore un verre à la santé de la mer. A la santé de la sirène qui est tatouée sur mon bras. Qui saute à la mer chaque nuit et me trompe avec Poseïdon. Elle revient le matin quand je dors encore, couverte d’algues et d’orties de mer. Quand nous restons longtemps à terre elle se fletrit et perd ses couleurs.
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Le matin à sept heures une sonnerie se déclenchait au dessus de votre tête et ne s’arrêtait que quand on sortait. Ça carillonnait partout dans l’hôtel. A sept heures dix il fallait être devant la porte. Alors un autre monde commençait à monter l’escalier. Tu vois : c’était les travailleurs de nuit qui allaient dormir.
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J’ai vu leurs femmes venir sur le quai avant que le bateau accoste et attendre debout sous le soleil ou sous la pluie. Je les ai vues dire adieu au moment où ils levaient l’ancre, tourmentées, estropiées par les avortements, avec une bande d’enfants qui se cramponnaient à leur jupe. Frustrées tu comprends; le mari est absent. Quand elles tombent sur un malin, il les a du premier coup. Pendant ce temps, les cocus se battent avec la mer et le vent. J’en connais un tas qui se sont fait coller des maladies par leur femme.
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Contre la cloison, vissée sur une console, était suspendue une lampe à huile en cuivre. Le ventilateur tournait, torréfiant le vide.

Le Pythéas plongeait doucement dans des mers muettes. Le temps paraissait peu à peu devenir plus maniable.
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Pour les perfumistas (on en trouve encore, du Pompeia de Piver, en fouillant bien) :
"A Marseille. J'ai vu ce pilotin de l'Argonaute, seize ans, avec sa casquette, qui gardait ses sous à la main pour ne pas les perdre. J'ai vu les lumières s'allumer tout d'un coup. Le Pont Transbordeur reprendre sa place. Les portes s'ouvrir et se fermer. J'ai entendu les disques enroués et les chansons de 1929. J'ai senti les caresses de la Pompeia de Piver. J'ai entendu le cric-crac que faisaient les rideaux de bambou et de perles dans les bistrots."
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Quelle chose perfide que le mal de mer. On devient un pantin, une chiffe. Vomissements, bile. On commence à s'habituer. On le croit. Le roulis ne vous donne plus la nausée mais le tangage continue à vous déranger. Puis cela passe aussi. Reste à vous habituer au roulis et au tangage conjugués. Enfin c'est chose faite. On est muté, on change de navire. Il faut apprendre les mouvements du nouveau ; chaque bateau a les siens. Un marin de cargos aura le mal de mer sur un paquebot.
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"Marie-Laure, souviens-toi du coup de pistolet à Bandol". J'ai vu ses yeux s'agrandir. Aqua marina. Devenir une mer, un abysse et je m'y suis noyé. J'ai récité à haute voix un vers sont elle m'avait dit qu'il lui donnait la nausée : "J'ai une pitié immense pour les coutures de son ventre."
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Ils ont repris le large. Ils l'ont immergé en haute mer. Voilà ce qu'il est devenu, l'autre. Des milliers d'autres. Un fond rempli d'ossements et de parures. Des poissons sans yeux, sans couleur. Il y a aussi un coffret de fer pleins de lettres, et au-dessus quelque chose d'effacé, une vague forme de main. Celle qui les a écrites dort maintenant dans le lit d'un autre. Elle halète sous le souffle d'un autre. Rien ne trouble son sommeil. Pas même la mer, qui vient de très loin et bat le seuil de la maison de pêcheurs. Si c'est une mère, elle cloue ses volets, les peint en noir au dehors et ne cuisine jamais de poisson. Si c'est une soeur... Un jour on s'arrête de pleurer. Il n'y a que la mère qui ne se lasse pas de pleurer, jusqu'à ce qu'elle ferme les yeux.
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Il y eut un bourdonnement. Puis ce fut comme si un nuage descendait. Le grand oiseau tomba devant eux, les ailes ouvertes.
- Salut, enfoiré, dit Cocky.(1)
- Tu es bien tombé, dit la guenon.
- Un épervier, je suis fait.
Le serpent se débina.
- D'où viens-tu ?
- De la terre ferme.
- Comment es-tu tombé ?
- Je voyageais vers le îles.
- Migrateur ?
- Je ne connais pas ce mot. Je m'en allais. On m'avait blessé. C'est la guerre là-bas.
- Il y a des noix ? - Cocky se mit à descendre. - Des mangues, des ananas ? J'ai décidé de filer.
- Si vous mangez les morts, restez. Vous vous lasserez d'en manger. C'est encore la nourriture la plus saine. L'eau, les vignes, le riz, les arbres sont empoisonnés.
- Qui répand le poison ?
- Les Blancs.
- Qui fait la guerre ?
- Les Jaunes.
- Pourquoi font-ils la guerre ?
- Comment savoir ? Paraît qu'ils sont trop nombreux. Le pays est devenu trop petit pour eux.
- Mais puisqu'ils meurent ?
- Ils naissent aussi.
- Ils n'ont qu'à se couper les choses.
- C'est leur raison de vivre.
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Mais nom d'un chien... J'ai des hallucinations, c'est pire que si j'avais pris de la neige. Si quelqu'un pouvait venir me jeter un seau d'eau sur la figure. Si une vague pouvait entrer me tremper, et faire taire ce grillon qui comme un marteau-piqueur électrique déchire la tôle de ma tête. Par où est-il entré ? J'ai fouillé tous les coins de la cabine radio, le plafond, les trous, l'étagère aux livres. Il est venu avec les provisions du bord, caché quelque part dans les légumes. Avec les scorpions, à Colombo. Nous avons tué les scorpions, mais ce monstre invisible je ne peux ni le voir ni le saisir, et pourtant il est près de moi, à côté de moi, sur moi, en moi. Au début il me divertissait. Il me rappelait une nuit d'été. Les meules de foin, le thym et l'origan. L'herbe fauchée. Les étables où dorment les bêtes de somme. Le premier jour. Mais à présent j'ai compris que je peux perdre la tête. Idiot ! Qui est né fou n'a rien à craindre. Ah...
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Je veux revoir Port-Saïd. Le bureau du Canal, le magasin de Simon Arzt, les arbres. Voir les cargos qui reviennent du sud et jettent l'ancre un instant. Les marins nordiques, nus, le corps blessé, accoudés au bastingage. Ils sont heureux de revenir une fois encore. M'en tirerai-je ? Reviendrai-je ? C'est un autre Port-Saïd que l'on voit quand on descend vers le sud. Il n'y a pour le marin rien d'autre que prickly heat powder, fruit salt et quinine. Bloody quinine, et des citrons qui pourriront au milieu de la mer Rouge. Des crabes qui sentent la vase. Est-ce la dernière femme avec qui je vais ? Combien ont connu cette peur. Je ne suis pas seul à avoir peur. D'autres aussi ont peur, mais ils ne veulent pas l'avouer. Je l'ai lu dans leurs yeux. Si tu crois que les marins vont te parler, t'ouvrir leur coeur, tu te goures. La vérité porte malheur. Nous la disons de temps en temps, dans le secret de notre coeur, et même ainsi elle nous fait peur.
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La main a remonté les couvertures sur ma tête et m'a enveloppé dedans. Une odeur chaude m'a caressé. Un corps de femme. Cela chasse la peur, cela vous calme, vous protège. À côté de lui, sur lui, on oublie qu'un jour on agonisera. Elle m'a caressé le front.
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