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Critique de nescio667


A peine rentré d'Ukraine (où l'on devine qu'il a dû s'acquitter de tâches atroces, tant l'envie de se suicider le tenaille) le capitaine Bernie Gunther retrouve Berlin en septembre 1941. Bien qu'il fasse partie du service de renseignement SS, il se voit ré-affecté à ce qui fut, avant, dans ce qui lui semble une autre vie, son premier métier : inspecteur de police. Ce boulot-là, au moins, il le fait bien. Ses supérieurs le savent, et parmi eux, Reinhard Heydrich, sulfureux ami de Himmler, ayant participé à la mise en place de la Shoah et initiateur des Einsatzgruppen. Pour une raison qui lui échappe, tant il exècre le nazisme, Gunther est protégé de loin par Heydrich, et c'est sans doute lui qui l'a redirigé vers la Police Criminelle. Mais, en ces temps où la vie ne tient qu'à un fil, Bernie sait qu'il doit jouer profil bas, ne pas étaler trop largement ses opinions anti-régime, si tant est qu'il tienne encore à la vie. Découverts à quelques jours d'intervalle, et à deux endroits différents dans Berlin, ce sont deux cadavres qui vont occuper ses premiers jours dans la capitale. le premier est celui d'un ouvrier hollandais, retrouvé dans une station de métro, et dont les supérieurs de Bernie semblent se laver les mains. le second est celui d'un Tchèque, gisant dans un parc. Il se fait que, par un hasard malencontreux, Bernie avait déjà rencontré la seconde victime : il l'avait surprise le soir précédent en train de malmener une jeune femme, l'avait mis en fuite, ce qui avait occasionné son télescopage avec un taxi quelques mètres plus loin. L'homme avait encore réussi à s'échapper, mais ses blessures devaient être plus graves puisqu'il était mort dans ce parc. Alors qu'il progresse dans la résolution des deux affaires, Gunther reçoit une invitation de Heydrich à passer le voir dans sa nouvelle demeure, en Bohème-Moravie, dont il vient d'être nommé gouverneur. Faisant contre mauvaise fortune bon coeur, Bernie prend le train, accompagné de sa nouvelle conquête, Arianne, la jeune femme qu'il avait sauvé des griffes du tchèque. À peine arrivé au château occupé par Heydrich, une nouvelle affaire criminelle lui est assignée.
Huitième volet du cycle consacré à Bernie Gunther par Philip Kerr, cette tranche de vie sous le drapeau nazi ne manque pas d'attraits et, pour le dire clairement, se révèle très vite passionnante, en tous cas pour un lecteur que ni cette période (la 2e Guerre mondiale) ni ce genre (le roman policier) ne rebutent. Précisons d'emblée qu'il n'est pas du tout nécessaire d'avoir lu les 7 autres aventures de Bernie pour apprécier celle-ci, Philip Kerr excellant -notamment- dans l'art de la contextualisation et de la présentation de ses personnages. Historique, certes, mais jamais pédagogique, « Prague fatale » dépeint par petites touches la vie quotidienne de la population allemande de l'époque -privations en tous genres, restrictions touchant tous les services au public- sans pour autant verser dans le misérabilisme. Parallèlement, Kerr montre que dès qu'il s'agit de préserver les apparences d'unité nationale, par exemple via une répression féroce de toute parole discordante, les plus grands moyens peuvent être débloqués. Il donne ainsi un éclairage inhabituel sur la période et surtout sur l'arrière du front, côté allemand. Aussi important soit le soin que l'auteur apporte à son cadre historique -et on le sent passionné- pour autant n'en oublie-t-il pas de fignoler son intrigue policière. Conviant espionnage, vengeance, affaire de coeur et meurtre en chambre close -avec un clin d'oeil appuyé à tante Agatha- Philip Kerr nous offre un condensé captivant du genre, un véritable régal, un texte que l'on oublie pas facilement et que l'on se passe entre potes. Voilà qui est fait, bonne lecture!
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