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Critique de Tricape


le médecin a le devoir de soulager son patient, qu'il soit saint ou fou.

Des faits avérés traités par un journaliste-romancier hors pair nous offrent un récit surprenant où cohabitent et collaborent Félix Kersten (1898-1960), médecin rondouillard venu de Livonie, et le maigre Reichführer-SS Heinrich Himmler (1900-1945), surpuissant maître de toutes les polices d'Hitler.

Joseph Kessel s'appuie sur des données historiques et a lui-même rencontré après guerre le Dr Kersten. Bien entendu, il ne peut qu'imaginer les dialogues qu'il rapporte dans cet ouvrage, mais grosso modo, sans trop l'enjoliver, il reste fidèle à la trame principale de cette histoire véridique : un médecin d'origine estonienne devient l'intime d'Himmler en réussissant à le soulager de maux sur lesquels la médecine classique n'avait pas de prise. Himmler ne pouvait plus, après y avoir goûté, se passer des merveilleux massages du bon docteur Kersten. Des études récentes corroborent pour l'essentiel le "rapport" de Kessel.

Transposé dans un autre contexte, ce récit aurait très bien pu être habillé en tragédie grecque : un tyran exterminateur s'attache les services d'un ennemi. Ce dernier utilise la seule arme dont il dispose (ses dons de guérisseur) pour obtenir de l'intraitable organisateur de massacres et déportations en tout genre la libération de milliers de prisonniers. La situation dans laquelle se trouve de Dr Kersten est extrêmement périlleuse. Sa vie est perpétuellement menacée ; dans un premier temps parce que la Gestapo le soupçonne de manipuler son supérieur et, ensuite, quand les forces alliées se jettent en fin de guerre sur le Reich en plein chaos apocalyptique créant un climat d'effondrement propice aux attentats vengeurs.

Tout comme Primo Levi qui, à la pire extrémité de l'inhumanité d'un camp de concentration découvre le geste d'un homme partageant son pain (ce qu'une bête n'aurait jamais fait), Kessel place la bonne volonté d'un médecin au coeur même de la machine infernale responsable de millions de morts.

Il ne faut jamais désespérer de l'être humain.
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