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Critique de Nastasia-B


Je n'avais, jusqu'à présent, entendu que du bien de cette pièce et de son auteur, et par plein de gens différentes, situées à divers endroits du temps et de l'espace (ce qui revient au même d'après Einstein, mais pas pour moi). J'y allais, par conséquent, absolument confiante et puis… et puis… je me suis rendue compte, chemin faisant, que le mot « confiante », pouvait parfois s'avérer trompeur, car, sous des atours volontiers positifs et affriolants, il était, mine de rien, composé de deux autres mots qui, pris séparément, ne le sont plus autant, l'un qualifiant manifestement mon optimisme, et l'autre… enfin bon, je vous laisse en penser ce que vous voudrez.

Tout d'abord, je vais essayer de m'en tenir aux faits, d'un point de vue purement physique, pour continuer de faire plaisir au sieur Einstein : voici une pièce, mesurant pile cent pages format poche, écrit assez gros, avec beaucoup de blancs autour. Je me disais, par devers moi : « Ça ne va pas être trop long à avaler, cette chose-là. » Mais, aïe, aïe, aïe, peuchère ! Sitôt que j'ai eu mis le nez là-dedans, si j'arrivais à lire un grand maximum de cinq pages d'affilée à chaque tentative, je m'estimais heureuse et même assez vaillante pour arriver à une telle performance, tant il me fallait braver héroïquement l'ennui — au moins de l'acabit d'un Saint Michel en armure luttant face au dragon, pas en-dessous comme calibre, vous voyez le genre !

Moralité, j'ai mis un temps prodigieux à lire ce livre pourtant ridiculement petit, trop petit sans doute, voilà pourquoi il me tombait des mains, très certainement. Ça déjà, quand un texte vous scotche autant que cela, c'est un premier indice, pas hyper favorable, convenons-en. Toutefois, à l'issue de mon époustouflante victoire — que dis-je victoire, TRIOMPHE ! — face au redoutable ennui griffu, j'ai décidé — encore une idée lumineuse de ma part, ça, tiens ! — de laisser décanter un peu le machin, histoire de voir si le texte me laissait des traces, des impressions nouvelles ou autres avec le temps, s'il faisait naître postérieurement un quelconque je-ne-sais-quoi…

Et oh là, là ! Misère ! Non seulement rien n'est apparu mais c'est même tout le contraire, je me rends compte après seulement une semaine de décantation qu'il faut vite, vite que je me dépêche d'écrire quelque chose avant que mon cerveau n'ait fait son nettoyage et avant que d'avoir totalement oublié de quoi pouvait bien parler ce fichu texte. Pfff ! Ce n'est pas brillant, comme recension, vous noterez, je me débats, prise en étau entre les affres de l'ennui, d'une part, et les ravages de l'oubli, de l'autre, qui se tirent une bourre à qui mieux mieux.

Bon alors, sur le versant positif, l'adret de mes sensations, si je puis dire, j'ai trouvé que le titre possédait une belle énergie, un caractère bien féroce, qui donne envie au lecteur d'aller y voir, et puis… bah… hormis ça, je ne vois rien d'autre sur ce versant, me concernant.

Sur l'ubac, qu'on pourrait aussi appeler le versant sombre de mon déplaisir, il y a tout le reste. Des personnages pas attachants, creux, factices, translucides, caricaturaux, qui n'interagissent quasiment pas entre eux, et quand ils interagissent en face à face, ce sont des répliques qui durent trois pages, histoire de rendre le dialogue assez crédible, n'est-ce pas, et, qui plus est, pour ne rien dire le plus souvent, sans oublier des aberrations psychologiques en veux-tu en voilà, un fond de propos qui tient dans l'extrême culot d'un dé à coudre, des scènes par moments où les personnages parlent qui en wolof, qui en allemand (non traduit, évidemment, sans quoi ce n'est pas drôle), bref, une nouvelle fois : Pfff ! Pour moi, entre lire ça, la notice en quatre langue de mon poêle à granulés ou la rubrique nécrologique du canard local dans les toilettes, mon coeur balance.

Est-ce que j'ai envie de vous expliquer qui sont les quatre brillants personnages de cette brûlante pièce ? Bof… Est-ce que j'ai envie de vous parler de l'intrigue — si intrigue il y a ? Re-bof… Est-ce que j'ai envie de passer dare-dare à une autre lecture ? OUAIS ! YES ! TOUT DE SUITE ! JE SUIS PARTANTE !

Franchement, ce qu'en dit la fiche de présentation de Babelio me paraît déjà très hautement détaillé pour ce qu'il y a à en dire : « Trois êtres humains se retrouvent isolés dans un certain lieu du monde qui leur est étranger, entourés de gardiens énigmatiques. » Une phrase, ça suffit, ça me semble très bien, très complet. Si on tient absolument à faire dans le chirurgical, dans l'ultra précis, je veux bien encore me fendre d'aller vous recopier le résumé Wikipédia, qui dit ceci :

« En Afrique de l'ouest, un chantier de travaux publics, clos par une barrière gardée, est dirigé par deux expatriés français blancs que tout oppose : le responsable est âgé, sans diplômes mais expérimenté, son adjoint est un jeune ingénieur. le responsable a fait venir sa future épouse de Paris. Un homme noir vient réclamer le corps de son frère, ouvrier du chantier, victime d'un prétendu accident du travail. »

Et je vous jure que, chez Wikipédia, ils sont allés récurer tout ce qu'il y avait sur la scène, gratter tout partout dans les rainures, le moindre petit truc incrusté, pour en faire un gros bilan de 4 phrases, c'est dire si c'était dense et consistant cette affaire-là. (Même si, je ne suis pas exactement d'accord avec eux : le chantier n'est pas dirigé par les 2 en question, puisque l'un est le chef de l'autre et que le chef a lui-même des chefs au-dessus de lui, le type noir n'est pas du tout le frère du décédé, et la femme ne sera visiblement jamais l'épouse de l'autre, mais ça, vous comprenez, on s'en fiche éperdument, n'est-ce pas, vu que ça n'a aucune incidence, ni aucune importance dans cette pièce.)

Donc, pour conclure : crédibilité, brio, profondeur, le triplé gagnant. Si un jour, d'ici trois semaines environ, quelqu'un me demande ce que je pense de cette pièce, il est fort probable que je répondrai à ce moment-là, en toute sincérité, que je ne l'ai jamais lue, puisque je n'en aurai assurément rien retenu. Alors excusez-moi Bernard-Marie Koltès, et rassurez-vous, ça n'est que mon avis, un combat de nègre ennui et de chiens d'oublis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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