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Critique de ODP31


Quand la fiction butine la réalité, j'en fais mon miel.
Pour me changer les idées et fuir l'actualité, quoi de mieux que de me plonger dans un un roman qui parle du conflit Ukrainien ? Oui, je sais, c'est un peu comme lire du Musso pour soigner une gastro !
Sergueïtch est un apiculteur plus très happy qui vit seul avec ses ruches dans un village abandonné du Donbass. Isolé dans cette zone grise depuis l'annexion de la Crimée, il compte les points entre les séparatistes russes et les militaires ukrainiens qui s'"artillent" à proximité. Dans ce no man's land, dépourvu tout autant de womans, il survit sans électricité, éclairé de cierges et réchauffé de souvenirs, avec pour unique voisin, un ennemi d'enfance, Pachka. Deux lassés pour compte mais dont les âmes ne sont pas tout à fait mortes.
Pour passer le temps pourri et l'hiver sans fin, ce "mieleur" parmi les meilleurs, se remémore des périodes plus fastes où des dignitaires locaux venaient s'allonger sur ses ruches pour être apaisés par le bourdonnement de ses Maya-vitch. Une sorte de Yoga ukrainien pour certains soviets un peu piqués. A bien y réfléchir, entre moi et moi, ce n'est pas plus crétin qu'un massage aux pierres chaudes.
Au printemps, Sergueïtch, qui aurait pu faire l'effort de s'appeler Serge pour me faciliter la frappe, décide de quitter son village avec ses abeilles pour une cure de pollen dans des lieux moins hostiles. Direction la Crimée pour des amitiés tatares.
Avec Andrei Kourkov, l'humour répond toujours à l'horreur et à défaut de faire ciller l'oeil de Moscou, le célèbre romancier ukrainien, issu d'une famille de dissident russe, offre un récit d'aventures picaresques qui m'a rappelé les meilleurs romans d'Arto Paasilinna, cet auteur scandinave qui peuplait souvent ces histoires de bestioles du grand nord. Alors que le finlandais taxidermiste humanisait les lapins et les ours, le bestiaire littéraire de Kourkov comptait déjà un pingouin et des truites. Ici, il recueille dans son arche ces insectes stakhanovistes de la nourriture des dieux… et de la cire épilatoire. Aïe. Il faut toujours que je gâche tout.
Dans ce récit, les rencontres sont improbables et les situations, au coeur de la guerre, muent l'absurde en humanisme. Les dialogues de taiseux qui rompent les ruminations du héros ont ravi ma solitude de lecteur.
Le propos n'oublie pas non plus dans ce contexte d'être politique. Les abeilles ne quittent pas la ruche mais elles symbolisent pour Sergueïtch, une société idéale, unie et solidaire. Côté communisme, elles en connaissent un rayon.
Ce roman, qui fera date, a été publié juste avant la transhumance russe du mois de février. Depuis, Kourkov n'a plus écrit une ligne de fiction et il met sa plume et sa notoriété au service de son pays dans des articles et tribunes publiés dans toute l'Europe.
J'espère qu'il pourra nous offrir d'autres romans de sa plume qui n'est pas grise. Plutôt jaune et bleu.
J'ai adoré cette histoire qui pourrait faire un jour un très beau film..
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